l’OSW dans la cour des grands!
Concerto pour piano No 4 en sol majeur, op. 58, Ludwig van Beethoven
Symphonie No 7 en mi majeur, Anton Bruckner
Orchestre symphonique de Winnipeg, dir. Alexander Mickelthwate
Anton Kuerti, piano
Le 18 février 2011, Salle de concert du Centenaire
Pour le 8e concert de la série Masterworks de l’OSW, Alexander Mickelthwate présentait un programme ambitieux comprenant le subtil Concerto pour piano No 4 de Beethoven avec le renommé Anton Kuerti au piano et la monumentale Symphonie No 7 de Bruckner.
Beethoven a révolutionné la musique autrichienne en écrivant une musique poétique, intimiste, exprimant ses émotions et ses sentiments personnels. Le Concerto No 4 inaugure aussi un genre nouveau, étant à la fois symphonie pour orchestre et fantaisie pour piano. L’orchestre et Kuerti en ont donné une interprétation de bon niveau. Cette présentation avait une allure inter-générationnelle. À 72 ans, Kuerti pourrait être le père du chef et de la majorité des musiciens de l’orchestre. Après 60 ans d’une superbe carrière au cours de laquelle il a du jouer ce concerto des centaines de fois, Kuerti demeure très à l’aise au piano. La technique est excellente et il a encore beaucoup d’énergie mais on sent moins de fluidité dans le mouvement. Il joue certes sans faute mais les doigts semblent moins aptes à caresser les touches, à exprimer les émotions. On le sent dès l’ouverture, confiée au piano. L’introduction du thème n’est pas suffisamment expressive. On l’a constaté ensuite particulièrement dans les passages subtils où le piano dialogue ou argumente avec l’orchestre, entre autres au deuxième mouvement. Mickelthwate a dirigé l’orchestre en ayant soin de maintenir un bon équilibre avec le piano. Les parties d’orchestre ont été jouées avec beaucoup d’expression, ce qui a relevé le niveau de l’ensemble.
La Symphonie No 7 de Bruckner est une oeuvre imposante. C’est l’oeuvre de Bruckner qui a connu le plus de succès de son vivant et c’est sa symphonie la plus appréciée encore aujourd’hui, surtout à cause de son Adagio. C’est la seule, avec la Sixième, qu’il n’a jamais remaniée. Bruckner a commencé à écrire la Septième symphonie en septembre 1881 avec le pressentiment de la mort de Wagner, qui est décédé le 13 février 1883. Bruckner a confié que l’inspiration de l’Adagio a lui est venue de l’annonce de la grave maladie dont souffrait Wagner. En hommage à ce dernier, Bruckner a inclus dans le mouvement un quatuor de tubas wagnériens. La très émouvante coda de l’Adagio a été écrite suite à l’annonce de la mort de Wagner.
L’oeuvre n’avait pas été jouée par l’OSW depuis 1982. C’est donc la première fois que l’orchestre actuel l’interprétait. Alexander Mickelthwate est très inspiré par la Symphonie No 7, comme il nous l’a communiqué avec conviction dans sa présentation de l’oeuvre avant d’en commencer l’exécution. Cette oeuvre, d’une durée d’environ 75 minutes, contient une matière abondante et très riche. Comme face à une grande fresque, il faut regarder l’ensemble et le laisser nous toucher au coeur plutôt que d’analyser les détails. L’impression qui est restée, à la fin, c’est d’avoir entendu beaucoup de belle musique, mais de ne pas avoir été ému. Pourtant, cette oeuvre contient des passages qui peuvent émouvoir jusqu’aux larmes. L’orchestre a réussi à maîtriser la partition, ce qui est très bien, mais il n’est pas parvenu à exprimer tout le contenu émotionnel et le caractère spirituel de l’oeuvre, malgré les efforts déployés par le chef pour, l’y amener. Bien sûr, cela dépend de ces multiples détails qui donnent de l’expression, de la lumière, de la couleur. Une nuance trop accentuée ou trop peu accentuée, une section qui joue avec moins de justesse, avec trop ou trop peu d’intensité, un manque de souplesse dans le rythme. Mais ce sont des détails qui se corrigent avec le temps, avec l’expérience. Cette oeuvre est imposante et il fallait de l’audace pour s’y attaquer. Il faut souhaiter que l’orchestre continue à enrichir son répertoire d’oeuvres de cette envergure, car il a démontré qu’il en est capable. Déjà, après avoir relevé de défi de la première, les musiciens ont peut-être pu jouer avec plus de liberté lors de la reprise du lendemain et davantage émouvoir l’auditoire.