Jacquelyn Hébert.
Jacquelyn Hébert

L’artiste multidisciplinaire franco-manitobaine, Jacquelyn Hébert, travaille depuis février 2011 sur un projet au sujet de l’identité francophone au Manitoba.

Camille SÉGUY

Élève en maîtrise d’arts à l’Université de Concordia au Québec, dans le département des fibres « au sens très large », précise-t-elle, l’artiste winnipégoise Jacquelyn Hébert s’intéresse depuis longtemps à la question de l’identité au Canada, notamment francophone.

« Je voulais explorer l’identité canadienne et franco-canadienne, mais c’est trop large, indique-t-elle. Je vais donc traiter de l’identité franco-manitobaine. C’est la première fois que je fais un projet sur ma communauté. C’est mieux car je sais de quoi je parle. J’ai l’expérience de l’intérieur. »

Pour Jacquelyn Hébert, il est important, pour garder sa force culturelle, d’identifier des héros contemporains au lieu de trop rester dans le passé. « On associe souvent l’héritage franco-manitobain aux Voyageurs, remarque-t-elle. Ce sont des choses assez anciennes et éloignées de nous. C’est bon de ne pas oublier le passé, mais c’est aussi important d’être fiers du présent et d’avoir des héros plus récents à qui s’identifier. Sinon, c’est plus facile de nous assimiler. »

L’artiste a appelé son projet Francophone hybride car « c’est la réalité au Manitoba. On ne peut pas seulement être francophone, on doit aussi connaître l’anglais et c’est correct! C’est rare d’être aussi bilingue et c’est une force. Je l’ai réalisé dans mes études à l’extérieur et mes voyages à l’étranger ».

Deux volets

Le projet Francophone hybride comprendra deux volets. Le premier sera une installation visuelle et sonore, et le second sera une série de sculptures.

Pour son installation, Jacquelyn Hébert fait appel aux francophones, francophiles ou même anciens francophones de la communauté, de tous horizons. « Je fais des entrevues audio d’environ 30 minutes, indique-t-elle. J’essaie de parler à des gens de divers âges et expériences car la communauté franco-manitobaine change. (1)

« C’est audio car les gens oublient plus facilement qu’on enregistre quand il n’y a pas l’image, explique-t-elle. Ils livrent mieux leurs histoires avec le français dans un milieu minoritaire, et c’est ce qui m’intéresse. Il n’y a pas de mauvaises réponses, juste des expériences différentes qui font la complexité de n’importe quelle identité. »

Le visuel sera toutefois bien présent dans son installation. Jacquelyn Hébert photographie et filme des lieux d’importance historique pour Saint-Boniface et la francophonie manitobaine. Elle utilise notamment la technique photographique du sténopé, ou trou d’aiguille. « Dans mon installation, je mettrai côte à côte les photos et le film du même lieu, et j’insérerai des extraits d’entrevues, certainement au sujet du lieu », annonce l’artiste.

En parallèle, Jacquelyn Hébert a commencé à visiter le Musée de Saint-Boniface et le Centre du patrimoine pour identifier des objets d’importance historique pour la communauté franco-manitobaine. Elle prévoit de recréer ces objets par des sculptures.

« Je vais utiliser la technique des médias mixtes, c’est-à-dire une combinaison d’objets fabriqués et trouvés, indique l’artiste. Je n’ai pas l’habitude de travailler en trois dimensions, mais je voulais me pousser à essayer. J’aime la relation qu’on peut avoir avec l’objet, la possibilité de marcher autour. »

Jacquelyn Hébert prévient toutefois qu’elle prendra quelques libertés avec ses reproductions d’objets. « Je vais reproduire les objets du Musée de façon à incorporer des éléments plus contemporains, signale-t-elle. Je veux créer la confusion chez le spectateur, jouer avec ses idées culturelles. Ce sera ressemblant, mais pas pareil. C’est le propre des beaux-arts de faire poser des questions sur le monde. »

Jacquelyn Hébert espère terminer son projet au plus tard au printemps 2012. Elle a obtenu une bourse de 17 500 $ du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada pour l’aider dans ses démarches.

(1)  Pour participer aux entrevues, contacter Jacquelyn Hébert à l’adresse [email protected] d’ici le 15 juillet. L’artiste peut envoyer sur demande la liste des questions.