Madame la rédactrice,

Avouons que la proposition de Roger Léveillé de moderniser l’organisation du Cercle Molière a du bon sens.

Depuis quoi? 86 saisons le Cercle Molière est devenu aussi indispensable à la collectivité du Manitoba français que Sophocle et les autres l’étaient aux Athéniens. Et Athènes, le berceau de la démocratie, celle de Socrate et des autres, avait bien compris la capacité du théâtre à rassembler les citoyens, à les saisir par la force évocatrice de la scène, à les lancer dans le dialogue avec soi-même et avec autrui. Elle l’avait si bien compris, Athènes, qu’elle fit du théâtre un service collectif, et autant pour les gens du théâtre que pour le public.

Le Cercle Molière est une de nos institutions les plus précieuses. Il était essentiel lors de sa création, il est essentiel aujourd’hui. Sans lui nous ne serions pas ce que nous sommes.  C’est une évidence. Parce que Molière c’est l’élan, l’éclat du mot qu’on lance à pleine bouche! Molière c’est une idée de l’humain, la lucidité et l’audace, un certain panache aussi. C’est aussi un miroir dressé devant nous et le regard que nous y portons c’est sur notre âme que nous le posons. Et c’est pour assurer la pérennité de ce théâtre qu’il faut revoir la structure du Cercle Molière.

C’est aussi une évidence que pas de théâtre sans public, c’est le commensalisme ; comme ces bactéries que nous nourrissons dans nos intestins et qui nous gardent en santé.

Mais, et permettez-moi de conserver l’analogie biologique, j’observe une variation dans l’évolution de la collectivité et celle de notre théâtre.

En effet, lors de la fondation du Cercle Molière la gestion des organismes communautaires était essentiellement autocratique, inspirée par le tissu clérical qui couvrait la société. On y entrait en vocation. Aujourd’hui, la laïcisation et la démocratisation ayant fait leur œuvre chez nous comme ailleurs, la gestion de ce type d’organisme est devenue associative et coopérative. À preuve les conseils d’administration qui peuplent nos Prairies et les assemblées générales annuelles qui encombrent les calendriers de nos frigos et payent les chalets de nos traiteurs.

C’est le prix de la création et du maintien des liens associatifs.

Mais, alors que tous les autres organismes, qu’ils soient des domaines artistiques, culturels, sociaux, politiques, économiques ou éducatifs sont redevables à la collectivité par un système électoral, le Cercle Molière ne l’est toujours pas.

Il est temps que le conseil d’administration du Cercle Molière prenne les mesures qui assureront sa légitimité et sa pérennité auprès de la collectivité et auprès de ses bailleurs de fonds. Cela ancrera encore davantage la présence de notre théâtre au cœur de notre société. L’organisation d’une assemblée générale constituante ouverte à tous les membres du Cercle Molière, nommément les abonnés, sera un premier pas.

Il en va de notre prospérité à tous.

A vous la parole

Bertrand Nayet | Saint-Boniface (Manitoba) | Le 1er février 2012

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