Se lancer dans le monde des affaires au Manitoba présente certes quelques difficultés, mais surtout beaucoup d’avantages. Trois nouveaux arrivants expliquent leur parcours professionnel, tel qu’il a été vécu ici et en-dehors du pays.
Ils viennent de France, du Congo et du Royaume-Uni. Pour des raisons qui leur appartiennent, ils ont choisi de s’établir au Manitoba et d’y fonder leur entreprise. Tous les trois ne regrettent aucunement leur choix.
Nathalie et Gilles Gauthier ont ouvert leur boulangerie française, À l’Épi de blé, le 16 août 2011. Comparé à la France, le montage du dossier de création d’entreprise s’est révélé beaucoup plus simple. « À condition d’avoir les fonds financiers, le processus se fait assez aisément, explique Nathalie Gauthier. L’enregistrement de la société, par exemple, s’effectue dans la journée. Le tout est de s’entourer d’un bon avocat afin de vérifier tous les termes des contrats et d’éviter ainsi de mauvaises surprises. »
Patrick Tshiovo, qui a fondé son école de conduite Auto-École Prestige Driving School en 2006 est du même avis. « Le tout est de réaliser une bonne étude de marché afin de déterminer s’il y a une demande sur le territoire, indique l’entrepreneur d’origine congolaise. Ensuite, pour le nouvel arrivant, suivre une formation dans un centre de business permet de faciliter les démarches entrepreneuriales. L’assistance ici est beaucoup plus avantageuse qu’au Congo où il n’existe pas de réelle réglementation et où, dès lors, les dérives sont multiples. »
De son côté, Philippe Goux, d’origine française, a travaillé 20 ans au Royaume-Uni avant de venir s’installer au Manitoba. Boulanger à Manchester, il est maintenant le propriétaire d’une entreprise de rénovation à Fannystelle. « La bureaucratie est plus importante ici qu’au Royaume-Uni, indique-t-il. Lorsqu’il s’agit de rénovation, il est nécessaire d’avoir un permis pour tout, ce qui n’est pas le cas en Europe, à condition de ne pas toucher à la structure des bâtiments. La chance que j’ai est que mon épouse est manitobaine et son père, avocat. Il m’a beaucoup aidé à y voir plus clair au niveau des lois. »
Une des difficultés qui peut s’imposer aux nouveaux arrivants est la méconnaissance de l’anglais. Bilingues, Patrick Tshiovo et Philippe Goux n’y ont pas été confrontés. Les époux Gauthier s’y sont préparés et sont parvenus à surmonter l’obstacle. « Par contre, le plus compliqué pour nous est d’attirer la clientèle, remarque Gilles Gauthier, car les Canadiens n’ont pas la culture du petit-déjeuner qu’ont les Français. Ils ne connaissent pas non plus le beurre qui, pour nous, est essentiel à la production d’un produit de qualité. Notre plus grand défi est donc celui de changer les habitudes et les goûts. Et, évidemment, cela prend du temps. »
Patrick Tshiovo et Philippe Goux, quant à eux, n’ont aucune difficulté à trouver leurs clients. Dans leur cas, le bouche à oreilles suffit et porte ses fruits. « Le service bilingue est mon atout », déclare le premier.
Cette caractéristique linguistique constitue aussi un avantage pour Philippe Goux. « Mon épouse et moi nous sommes installés à la campagne parce que l’on souhaitait avoir du terrain, explique l’entrepreneur. Les distances à parcourir sont plus longues que si j’étais en ville, mais je trouve malgré tout du travail. Et la pratique du français me sert puisque de nombreux clients ne font appel à moi que pour cette raison. Les francophones des alentours sont désireux de pratiquer leur français et travailler avec moi le leur permet. »
Des facilités manitobaines
Conseiller en finances et en affaires au Conseil de développement économique des municipalités bilingues du Manitoba (CDEM), Joël Lemoine reconnaît au Manitoba certains avantages entrepreneuriaux inexistants ailleurs au Canada.
« On trouve ici Business Start, un programme provincial de trois jours qui permet aux intéressés de comprendre les notions élémentaires en matière d’entreprenariat, avance-t-il. La grande difficulté pour les nouveaux arrivants se situe au niveau financier, continue-t-il. Dépourvus d’historique de crédit, méconnus dans la province, les institutions financières sont réticentes à les soutenir dans leurs projets.
« L’inscription au programme Business Start a pour avantage que la province, à l’issue de la formation, remet à l’étudiant un certificat de présence qui peut être utilisé auprès d’une institution financière en vue d’obtenir une garantie financière allant jusqu’à 30 000 $, soutient-il. Le Manitoba est la seule province qui favorise de la sorte les petites et les moyennes entreprises. »
Par Angelika ZAPSZALKA