Plus de 200 personnes réunies le 1er décembre en avant de l’ancien hôtel de ville de Saint-Boniface ont crié en choeur, à gorge déployée : Nous sommes, nous serons!
Par Morgane LEMÉE
La manifestation avait commencé par une marche solidaire entre l’Université de Saint-boniface et le boulevard Provencher, suite à ce qu’on appelle déjà le « jeudi noir » : le 15 novembre dernier, le Premier ministre de l’Ontario, Doug Ford, annonçait l’élimination du projet de l’Université de l’Ontario français et la fin du Commissariat aux services en français. S’en est suivie une vive réaction francophone, qui ne s’est pas limitée aux frontières de l’Ontario. De l’Acadie à la Colombie-Britannique, en passant par Whitehorse et Saint- Boniface, des Franco-Canadiens ont manifesté leur soutien à l’Ontario français.
À Saint-Boniface, les manifestants ont assisté à une levée symbolique du drapeau franco-ontarien, hissé aux côtés du drapeau franco-manitobain. Au même moment, des milliers de Franco-Ontariens se rassemblaient aux quatre coins de leur province lors d’une manifestation sans précédent.
Ariane Freynet-Gagné, la présidente du Conseil jeunesse provincial, est à l’origine du rassemblement manitobain, avec un coup de pouce de l’Association étudiante de l’Université de Saint-Boniface et de la Société de la francophonie manitobaine. C’est avec grande émotion qu’elle a tenu son discours. « S’exprimer sur les médias sociaux, c’est une chose. Se rassembler, en personne, c’est encore plus fort. »
Après cette « journée historique », elle souhaite que le 1er décembre devienne, à vie, « la journée de la solidarité francocanadienne ». « Pour moi, c’est un pari gagné. Peut-être qu’on n’aura pas réussi à changer la décision de M. Ford, Pallister ou Higgs, mais je sais qu’on a inspiré des personnes dans des positions plus importantes et susceptibles de le faire. Je me suis rendue compte samedi qu’on a des alliés partout. On a fait passer le message : ça vaut la peine de se battre. Et que ce mouvement vienne des jeunes, c’est encore plus fort. Je suis pleine d’espoir. Le bilinguisme est un projet de société, qu’on va tous protéger, ensemble. »
Justin Johnson
vice-président de la Fédération des communautés francophones et acadienne :
« Voir en ce moment en Ontario, au Nouveau-Brunswick, des gens qui sont à l’aise de parler publiquement contre le bilinguisme, des gens qui pensent que la francophonie n’est qu’une question d’économie, c’est inacceptable. La lutte en Ontario, c’est notre lutte. On est là, et on le restera toujours! »
Ben Maréga,
président de l’Association étudiante de l’USB :
« Ce mouvement aujourd’hui, c’est extraordinaire. Je suis vraiment ému. Ça montre le pouvoir de la francophonie. Dans la solidarité, ensemble, on peut arriver à beaucoup de choses. Et on va arriver à beaucoup de changements. »
Dan Vandal,
député fédéral de Saint-Boniface / Saint-Vital :
« Comme représentant et membre d’une communauté francophone en situation minoritaire, je pense que c’est important de se rallier avec les autres communautés. Une attaque contre les minoritaires en Ontario, c’est une attaque contre Saint-Boniface aussi. C’est important qu’on soit ensemble et qu’on se défende. »
Ariane Freynet-Gagné,
présidente du Conseil jeunesse provincial :
« Quel beau geste de venir en si grand nombre. On est tous ici parce qu’on croit que c’est important de protéger les minorités francophones au Canada. Nos droits sont dans la constitution, c’est non négociable. »
Patrick Lessard,
père de famille engagé dans sa francophonie :
« Aucune hésitation d’être là avec mes filles, âgées de presque deux ans et d’une semaine et demi. Il n’est jamais trop tôt pour créer des modèles francophones! Mes parents m’ont transmis ces valeurs, je tiens à leur transmettre aussi. On lâche pas la patate! »
Roxane Dupuis,
directrice du Conseil jeunesse provincial :
« C’est clair qu’on tient vraiment à notre solidarité francophone. Je pense qu’avec les coupures qu’on a eues au Manitoba, les gens se voient dans ce qui arrive en Ontario. On a peur et on se sent fragiles. Alors quand il faut se rassembler et se serrer les coudes, on est prêts à le faire. »
Raymonde Gagné,
sénatrice indépendante :
« Je dois avouer que je me retrouve dans les Ariane Freynet-Gagné, les Ben Maréga, tous ces jeunes qui sont là pour prendre la relève. C’est important. Ça veut dire qu’on lâche pas la patate. Mais c’est beau de voir cette jeunesse dynamique, engagée. C’est rassurant. Étant au Sénat, je tiens à surveiller et avoir une lentille francophone lorsqu’on établit les projets de lois. C’est extrêmement important. Je vais continuer à le faire au Comité sénatorial permanent des langues officielles. J’ai toujours espoir. Plus on va élever nos voix, plus on se fera entendre et on ira de l’avant. »