par Michel LAGACÉ
Le 12 mai 2018, un jour soi-disant symbolique, la ministre du Sport, de la Culture et du Patrimoine, Cathy Cox, enclenchait le compte à rebours du 150e anniversaire de la province. Elle annonçait alors la création d’un comité qu’elle co-présiderait avec Stuart Murray pour planifier les célébrations de 2020.
Il a fallu attendre presqu’un an avant que le Premier ministre, Brian Pallister, annonce la semaine dernière que la Province engagerait « 45 millions de dollars dans des projets d’infrastructure » qui « laisseront un héritage durable ». Les médias ont vite donné la vedette à la restauration de la fontaine du parc Memorial, dont les composantes « ont atteint la fin de leur vie utile ». Tous les autres projets réalisés « dans le cadre des célébrations du 150e anniversaire du Manitoba » visent la réfection ou l’amélioration de routes. Une liste ordinaire de projets d’infrastructure devait ainsi se transformer en “célébrations”.
Le comité du 150e a finalement lancé un site Web minimaliste le 29 mars 2019, un geste qui s’avère encore pire que son silence. Il se définit comme « un groupe d’experts locaux », puis il offre une page remplie d’erreurs sur l’histoire du Manitoba. On y lit qu’au fil de l’histoire, « la population a toujours eu la réputation d’être chaleureuse, accueillante et inclusive ». Bannies sont les injustices les plus flagrantes, dont la promesse jamais respectée de distribuer des terres aux enfants des Métis selon la Loi sur le Manitoba de 1870, l’abolition anticonstitutionnelle du français dans les tribunaux et la législature en 1890, la prohibition de l’usage du français comme langue d’enseignement en 1916, la lutte des classes qui a mené à la grève générale de 1919, et les préjugés traditionnels contre les juifs et les immigrants. Comment Stuart Murray, l’ex-chef du Parti progressiste-conservateur et surtout ancien PDG du Musée canadien pour les droits de la personne, peut-il s’associer à une telle campagne de désinformation?
Le comité du 150e évoque le conflit commercial «durant les années 1700 et jusque vers la fin des années 1800 » entre « la Compagnie de la Baie d’Hudson, de l’Angleterre, et la Compagnie du Nord-Ouest, de la France ». Aucune de ces compagnies n’a jamais été “de la France” et leur fusion en 1821 a mis fin à leur rivalité. Finalement, et contrairement à ce que répètent trop de politiciens , le Manitoba n’a pas été créé lors de la sanction royale accordée à la Loi sur le Manitoba le 12 mai 1870, mais bien lors de la proclamation de cette loi le 15 juillet de la même année.
L’ignorance de ce comité “d’experts” et le tour de passe-passe du Premier ministre déçoivent au plus haut point. Au lieu de mettre en valeur l’histoire de la province, M. Pallister se présente comme un politicien sans vision, pas du tout à la hauteur des fondateurs du Manitoba. De toute évidence, il nous prend pour des ignorants sans imagination et sans aspirations.