Alors que la garderie Les Bambins et la garderie Les Toupies ont toutes les deux reçues des bonnes nouvelles pour se développer, un problème commun persiste : celui de la pénurie d’éducateurs et d’éducatrices francophones.
Par: Ophélie Doireau
La garderie Les Bambins a officiellement un nouveau local pour opérer ses services de garde. Un soulagement pour sa directrice, Yasmine Jebara. « En juin, la garderie apprenait qu’il fallait déménager ses locaux à la suite de la dissolution de l’église anglicane St Phillip’s. La garderie avait alors 90 jours pour vider les locaux.
« Heureusement, l’église n’a pas été pas vendue rapidement, on a donc eu un peu de sursis. C’était difficile de trouver un local qui embrassait tous les critères de la Province et aussi nos critères surtout en termes de budget. Désormais, nous sommes au 480 avenue Chalmers dans un centre communautaire. »
Ce changement de quartier de Saint-Boniface à Elmwood fait que certains parents n’ont pas suivi ce déménagement. Avant, la garderie accueillait 40 familles et 12 employés.
« Nous sommes une garderie licenciée pour 40 enfants dont quatre poupons et 36 préscolaires. Actuellement, il y a 24 enfants, et toutes les places poupons sont prises. »
| Pénurie d’éducatrices et d’éducateurs
« Outre les familles qui sont parties en raison du déménagement, on a aussi perdu quelques employés à cause de la pandémie. Et il est très difficile de recruter des éducateurs et des éducatrices francophones en jeune enfance. Nous sommes 10 en ce moment dont cinq sont seulement des aides à l’enfance et deux sont aux études.
Une pénurie entre autres due aux bas salaires. En 2016, Statistique Canada dénombrait, au Manitoba, 7 625 aides éducatrices/aides éducateurs et éducatrices/éducateurs de la petite enfance dont 285 avaient le français comme langue première. Toujours d’après Statistique Canada, en 2015, leur salaire médian était de 27 459 $.
Marilyn Bosc, directrice de la garderie Les Toupies, confirme les propos de sa consœur, Yasmine Jebara.
« Il y a vraiment une pénurie dans le secteur de la jeune enfance. On publie des annonces en ligne, auprès de l’Université de Saint-Boniface, de la Fédération des parents de la francophonie manitobaine sur Facebook. Mais c’est très difficile de recruter, surtout du personnel qualifié.
« Nous avons douze employés dont deux à temps plein, ce ne sont que des personnes en formation actuellement. Elles passent du temps à l’école et en entreprise. »
Ce manque de personnel peut poser des problèmes alors que la demande est grandissante pour des services de garde en français.
« Nous avons reçu du financement de la Province qui a permis de nous agrandir. On peut accueillir maintenant 119 enfants, mais il nous faudrait une douzaine d’autres employés pour nous en occuper. »
Mélanie Cwikla, directrice de l’École technique et professionnelle de l’USB, souligne d’ailleurs la disponibilité du programme de l’USB en région pour palier la pénurie de personnel qualifié.
« Grâce à du financement de l’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne, notre programme de niveau II fonctionne sous forme d’études flexibles. C’est-à-dire que des élèves du rural n’ont plus besoin de se déplacer en ville pour suivre leurs études. »
Marilyn Bosc poursuit : « La demande est très forte autour de Saint-Norbert pour des services de garde en français. J’ai une longue liste d’attente de parents surtout pour les poupons. Ce sont les places les plus prisées.
« Je dirais que la pandémie a amplifié le manque de personnel parce qu’avec les isolements obligatoires et ce genre de choses, on ne pouvait pas savoir qui serait présent à la garderie. »
Si la pénurie existe du côté des aides et des éducatrices, elle est aussi criante pour les directions de garderie. « Moi-même pour être directrice de la garderie, il faut que je détienne un niveau trois, et je suis en train de l’obtenir au Collège Boréal en Ontario », confie Yasmine Jebara.
Un rapport de l’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne observait en 2019 une pénurie de personnel qualifié de niveau II et de III.
Dans ce même rapport, on peut lire : « En matière de formation, l’École technique et professionnelle de l’Université de Saint-Boniface offre le diplôme de niveau II en français, mais les étudiants et étudiantes doivent poursuivre leurs études en anglais afin d’obtenir un baccalauréat en études du développement qui donne droit à l’attestation de niveau III. »
Interrogée à ce sujet, Mélanie Cwikla explique : « Les derniers cours de niveau III ont été donnés à l’USB jusqu’en 2017. Mais on avait arrêté de prendre des inscriptions bien avant ça.
« En effet, le gouvernement provincial avait promis un nouveau cadre de compétences pour un programme d’éducateurs et d’éducatrices en jeune enfance. Il est très difficile de construire un programme sans cadre de compétences.
« En 2016, nous sommes partis en élections provinciales et aujourd’hui, encore, nous attendons un nouveau cadre de compétences pour offrir ce diplôme.
« D’ailleurs, nous ne sommes pas les seuls à avoir cessé notre programme de niveau III. Le Red River Collège l’a arrêté au même moment. »