Artiste peintre francophone installée depuis 20 ans au Manitoba, Emilie Lemay est très active sur la scène artistique locale. Elle raconte son parcours, ses inspirations et son lien fort avec la francophonie.

Par Matthieu Cazalets

Soudain, en entrevue zoom, Emilie Lemay tourne la camera pour dévoiler sa nouvelle toile, « un paysage ». « Enchantée! », lance-t-elle à son œuvre. Une illustration du lien fort qui lie l’artiste à ses peintures, qu’elle aime à partager avec le public.

Adoptée par le Manitoba

« Je suis arrivée ici en 2002 ». Emilie Lemay sillonne depuis 20 ans les paysages du Manitoba en recherche d’inspiration. Après des études démarrées au Québec, elle rejoint son conjoint manitobain, et ne quittera plus jamais la région. « J’ai fini l’école ici, à l’Université́ du Manitoba, aux Beaux-Arts ».

Celle qui a grandi au bord du Lac Brome a exercé́ plusieurs métiers, toujours tournés vers les arts. « Dans mes débuts professionnels, je travaillais aussi dans le milieu muséal, au Winnipeg Art Gallery, où j’étais facilitatrice de programmes scolaires. Puis, j’ai travaillé́ au Musée des Enfants, où j’ai été directrice des expositions et de l’éducation ». Déjà̀, l’illustration d’un lien social très présent dans la démarche de l’artiste.

Suite à la naissance de sa fille en 2009, Emilie Lemay entame une longue pause artistique. « J’ai recommencé en 2015 ». Elle se rapproche du mouvement culturel winnipégois. « À ce moment là, je suis devenue membre de la Maison des artistes visuels francophones et Mentoring Artists for Women’s Art ».

Devenue artiste à temps plein, elle endosse aussi un autre rôle : « À temps partiel, parce que je suis encore à la maison avec ma fille qui fait l’école à distance en ce moment. »

Ses toiles sont très liées aux paysages de la région : « Ce sont le ciel et la couleur qui illuminent les paysages du Manitoba qui m’inspirent le plus dans ma pratique artistique ». Un travail avec la peinture soluble à l’eau qui lui permet de « représenter le lieu, mais aussi la charge émotive. »

Sa façon de travailler ne change pas : « C’est le dessin et la peinture d’observation qui sont mon carburant dans tout ce que je fais. » Un processus extérieur d’abord, puis, dans un deuxième temps, un travail en atelier. Son site Internet (1) finit d’évoquer sa méthode : « Je complète ensuite mes œuvres en studio ou lors d’évènements de peinture en direct ».

La création de toiles depuis l’extérieur reste pour l’artiste « un moment privilégié ». « J’en fais, mais seulement quelques fois par an, il y a tellement de variables à prendre en compte, la météo par exemple ». Son travail est surtout guidé par un principe. « Il faut que ce soit inspiré de quelque chose, de quelque part, pour garder le contact avec le réel ».

Un projet tourné vers le social

Son autre passion, c’est « la médiation culturelle ». Ateliers, expositions, Emilie Lemay aime partager sa vision de l’art, « je suis ouverte à toutes les possibilités et j’aime aller vers le public. »

Pour elle, « la création est vraiment une porte d’entrée vers l’art et la culture. Quand les gens peuvent se mettre une toile sous la main puis en faire l’expérience, souvent, c’est le début d’une grande passion. »

L’art et le virtuel

Le virtuel lui permet de continuer ses activités sociales : « Avec la technologie, on dépasse vraiment les limites du temps puis de l’espace. » Un bon moyen de continuer ses activités. Elle admet en souriant : « Tout ce qui peut arriver lors de rencontres virtuelles, comme problèmes, surprises, défis, est arrivé́ ».

Des ateliers guidés par cette passionnée d’aquarelle devaient être donnés dans les semaines à venir des ateliers au Centre culturel franco- manitobain. Déjà expérimentés en septembre 2021, ils sont « un succès, avec des gens qui travaillaient l’aquarelle pour la première fois ». Ces évènements ont dû être reportés en avril et en mai 2022.

Emilie Lemay se dit « étroitement liée à la francophonie manitobaine », menant des ateliers en langue française partout dans la région. « Dimanche 16 janvier, j’ai donné des ateliers à des gens de Saint- Claude, pour créer une toile de A à Z ensemble ».

L’artiste évoque aussi un projet autour du drapeau de la francophonie manitobaine, avec l’Université́ de Saint- Boniface et le comité́ culturel de Saint-Claude. « Ce projet- là, c’était vraiment pour rassembler, pour célébrer la francophonie ».

L’intégration par l’art

L’accueil des nouveaux arrivants s’ajoute à ses projets. « J’ai aussi créé des liens avec l’Accueil francophone du Manitoba. ». « Une fois par mois, je leur offre des ateliers d’aquarelle, souvent, ce sont des gens qui n’ont jamais fait de peinture. » L’important n’est pas là, le contact social est créé et permet une adaptation plus douce pour les arrivants.

« Je vais continuer d’exposer de façon numérique cette année »

Exposition numérique

« Très incertain ». L’avenir de l’artiste reste flou pour 2022. Au-delà de futurs ateliers, à la Broquerie ou avec l’Accueil francophone, elle peint beaucoup.

« Des œuvres originales, des commandes et des toiles, que je travaille depuis un petit bout de temps ».

Grâce à un partenariat avec la Maison des artistes visuels francophones, elle est aujourd’hui membre de la galerie en ligne Gallea.

« J’ai déjà vendu une toile par l’entremise de leur site internet que j’ai expédiée jusqu’à Vancouver. Je vais continuer d’exposer de façon numérique cette année jusqu’à ce que les salles d’exposition reprennent leurs activités. »

(1) Retrouvez toutes les informations sur Emilie Lemay sur son site Internet : https://emilielemay.com/gallery.html