Joëlle Préfontaine, artiste albertaine bilingue et pluridisciplinaire, a publié aux Éditions du Blé dans la collection Nouvelle Rouge, une pièce de théâtre intitulée Récolte. Produite en 2013, la pièce reprend des anecdotes, transformées en fiction, de la vie de l’autrice.

Par Sonia ROUSSAULT

Originaire d’un petit village aux origines francophones appelé Legal en Alberta, Joëlle Préfontaine est comédienne, metteure en scène, écrivaine, chanteuse, danseuse et formatrice. Elle a suivi une maîtrise en beaux-arts en pratique théâtrale à Edmonton : « Je suis spécialisée dans la mise en scène, la dramaturgie, je fais un peu de concept, je chante, j’aime mélanger mes différentes disciplines », explique Joëlle Préfontaine.

Récolte est une pièce de théâtre produite en 2013. L’écriture de la pièce a pris entre deux à trois ans à l’autrice : « Je voulais écrire une pièce de théâtre qui était en français et en anglais », précise Joëlle Préfontaine. « J’ai ajouté beaucoup plus de français que l’on pourrait entendre dans ma communauté natale. Ça m’a poussé à développer le langage de mes personnages, je voulais refléter une réalité linguistique différente.

« J’ai travaillé avec une conseillère linguistique, Josée Thibeault, elle m’a beaucoup aidé avec les subtilités de phrases ou de mots pour m’aider à définir certains dialogues de la pièce. »

Dans Récolte, il y a beaucoup d’anecdotes familiales que Joëlle Préfontaine a transformées en fiction. Un processus créatif qui a mené l’autrice dans l’écriture de la pièce : « Par exemple, j’avais une arrière-grand-mère qui avait quitté sa famille dans les années 1930. Ça a soulevé la question chez moi de Qu’est-ce qui se passe pour se dire à un point, je ne peux plus, je quitte ma famille? »

C’est sur les thèmes de la violence physique, de l’alcoolisme, de la famille, de l’entraide, de l’avortement et de la religion que l’autrice a construit Récolte. Joëlle Préfontaine détaille : « Le personnage principal de Renée est une femme qui va aider tout le monde. Quand elle réalise qu’elle a besoin d’aide, elle n’est pas capable de demander autour d’elle. Dans le village d’où je viens et dans ma famille, on se soutenait face à des moments difficiles que certains pouvaient vivre. C’est un des points de vue que j’ai souhaité aborder. »

Au fur et à mesure de l’écriture de la pièce, les idées se dessinaient dans l’imaginaire de Joëlle Préfontaine : « J’avais imaginé en quoi ma vie aurait été différente si j’étais resté dans mon petit village : Est-ce que je me serais mariée jeune? Combien d’enfants j’aurais eu? Je me retrouve un peu dans le personnage de Renée en répondant à ces questions. Beaucoup de femmes de petits villages peuvent se retrouver facilement isolées.

« Sur le thème de l’avortement aussi, je me suis posée beaucoup de questions : Quelles sont les options pour ces femmes et Quel est le point de vue de la communauté? Le petit village dans lequel j’ai grandi était très religieux, j’ai toujours été entourée de personnes très généreuses. Je me demandais ce qu’elles pensaient vraiment à propos de l’avortement. En tant qu’adolescente, ce n’était pas vraiment un sujet que tu pouvais aborder. L’éducation sexuelle était très minimale.

« J’évoque aussi dans cette pièce de théâtre les rôles pré attitré comme : Oh, toi, tu vas devenir fermier et tu n’as pas le choix de faire autrement, ou encore, l’éducation des femmes qui n’était pas encouragée à une époque. »

Le cadre de Récolte se déroule dans une communauté agricole albertaine. Joëlle Préfontaine justifie le choix du titre : « Lorsqu’on sème, il faut ensuite en prendre soin. C’est pareil pour soi-même, il y a une connexion métaphorique entre les deux. »

Le choix de l’autrice s’est porté sur les Éditions du Blé pour faire paraître sa pièce. « J’ai connu cette maison d’édition à travers une couple d’artistes tel que Marc Prescott. En lisant ses pièces, je me suis rendu compte que l’on pouvait mélanger les langues, ça m’a donné la permission à moi-même, de publier mon ouvrage dans les deux langues. »

Récolte est disponible sur le site web des Éditions du Blé pour le prix de 15 $.