Dans les galeries du Steinbach Arts Council, des sculptures et des créations originales subliment des matériaux issus de la récupération.
Une forêt de sapins a pris racine sur les murs du Steinbach Arts Council (SAC). Un rapace nocturne, figé en plein vol, à la cime de Pinacées qui sont en fait créées à partir de vieilles scies à bois. Le crâne d’un bison fait de crochets et d’un phare de voiture, de vieilles fenêtres en bois qui se transforment en cadres. L’exposition Entre terre et ciel de l’artiste métisse francophone Pierrette Sherwood a commencé le 3 novembre et se poursuivra jusqu’au 8 décembre 2023.
Le façonnage du métal est au coeur du travail artistique de Pierrette Sherwood. Le métal sous toutes ses formes et de toute provenance. Sans aucune connotation péjorative, on pourrait presque parler de « recyclage artistique ».
« J’aime aussi faire de l’assemblage, un peu de collage, mais toutes mes pièces sont issues de la récupération. » D’ailleurs, même les morceaux qu’elle découpe lors de la fabrication de certaines pièces servent ensuite à en créer de nouvelles.
Le processus de création dépend en partie de ce qui tombe sous la main de l’artiste. « J’essaie de composer avec des pièces qui sont pertinentes au sujet. » Dans la galerie, elle balaie du regard la sculpture d’un bison, ou encore celle d’un cheval.
« Je vois une pièce et ça m’inspire quelque chose, dit-elle. Par exemple, pour le bison, je faisais un nettoyage de printemps et j’amenais beaucoup de métal au recyclage, puis j’avais cette pièce ornée de crochets de part et d’autre. Et là tout de suite, je me suis dit qu’il fallait que je la récupère. J’y ai vu des cornes et je me suis dit que ça pouvait faire un beau bison. »
Pour autant, le résultat final est rarement le même que celui qu’elle imaginait au départ. Pierrette Sherwood le dit elle-même : « Je sais ce que je veux faire, mais la sculpture évolue à mesure que je la fais. J’essaie plusieurs choses et le caractère de l’oeuvre ressort. La sculpture devient alors ce qu’elle est. »
Une balance à grain, le morceau de collier d’une charrue à cheval, ou encore des pièces agricoles reviennent souvent dans les créations de Pierrette Sherwood, et c’est approprié pour celle qui a grandi sur une ferme à La Salle. En tous cas, cela a eu un impact sur les sources d’inspiration de la Franco-Manitobaine.
« J’ai vécu à l’extérieur (du Manitoba) pendant 15 ans et c’est quand je suis revenu, ou bien peut-être est-ce en vieillissant, que j’ai voulu me rapprocher un peu de mes racines, de l’histoire et de mon héritage. Alors j’ai voulu faire quelque chose de grande dimension avec des pièces agricoles, et c’est là que j’ai commencé à jouer avec le feu (rires), la soudure! »
L’exposition, qui s’intitule Entre terre et ciel, évoque un thème « pas mal vaste », mais qui par conséquent permet d’aborder plusieurs choses, et notamment des thèmes « plus spirituels ». Ainsi, certaines pièces sont un habile mélange de peinture, de soudure et de la silhouette d’un aigle, pour parler de la quête « de renouveau dans l’adversité », par exemple.
« C’est nouveau, confie Pierrette Sherwood. J’ai commencé à jouer un peu avec la peinture pour faire ressortir certains éléments. »
Nouveau, car l’artiste a tendance à favoriser les pièces de métal et leurs couleurs naturelles dans son travail.
« J’avais l’habitude de tout nettoyer, mais je ne le fais plus. Mes oeuvres sont un peu imparfaites et j’aime ce côté rugueux, quand ça porte l’usure du temps. Je ne cherche pas une finition parfaite, je trouve que l’on perd la beauté du contraste. » Le contraste entre l’art et le matériau, l’utile et le poétique.
Alors que toutes les pièces exposées sont disponibles à l’achat, Pierrette Sherwood préfère avertir : « Ne vous attendez pas à de la perfection avec mon art, ça risque de rouiller et c’est ça qui est beau. C’est pour ça que je travaille le vieux métal, parce qu’il change avec le temps. »