Winnipeg, le grand projet des gens d’affaires des débuts de la province du Manitoba, a certes connu sa part de hauts et de bas économiques. À l’étape symbolique de ses 150 ans, La Liberté a décidé de se pencher sur ce microcosme d’humanité arrimé à La Fourche, cœur géographique du continent nord-américain et lieu de rencontres depuis des millénaires.
Les méandres pittoresques des rivières Assiniboine et Rouge, qui sont parties intégrantes du charme de la ville, trahissent cependant la faiblesse du lieu : la capitale manitobaine se trouve au fin fond d’une immense plaine inondable. À bien des reprises, de graves inondations ont exigé que la population se serre les coudes.
Mais la solidarité ne peut pas tout. Il a fallu la volonté politique de Duff Roblin, qui a su tirer les conséquences de la catastrophique inondation de 1950, pour que le canal de dérivation des eaux de la Rouge voit le jour. La remarquable infrastructure a protégé la ville en 1979 et lui a épargné le pire lors de l’inondation du siècle en 1997, qui a exigé l’agrandissement du canal.
Si les exigences de la géographie et des conditions climatiques parfois extrêmes ont été adéquatement relevées, il reste par contre beaucoup à faire pour dignement prendre en compte l’héritage historique de Winnipeg.
L’irrépressible prise de conscience de nos relations avec la population autochtone au cours des dernières décennies souligne une autre priorité à laquelle les leaders politiques, économiques et socioculturels doivent s’atteler résolument.
Fort heureusement, les réels efforts entrepris dans le domaine de la Réconciliation donnent à espérer que le vivre-ensemble des groupes humains qui ont forgé Winnipeg, et qui se traduit tous les étés par le festival des nations Folklorama et tous les hivers par le Festival du Voyageur, a de meilleurs jours devant lui.
Dans cette perspective d’un avenir encore plus solidaire, Saint-Boniface, ou plutôt l’esprit de Saint-Boniface, a un rôle historique à jouer pour consolider l’ouverture des uns aux autres. Historique dans le sens premier du mot, car il ne faut pas perdre de vue que l’ancienne ville voulue par les Métis et les Canadiens français est bel et bien l’héritière spirituelle de la Colonie de la Rivière-Rouge, qui avait été un modèle de tolérance linguistique et religieuse.
Le gouvernement néo-démocrate d’Ed Schreyer a été le premier au Canada à se lancer dans une vaste amalgamation d’entités municipales, entrée en vigueur le 1er janvier 1972 sous l’appellation UNICITÉ. Il a eu alors la sagesse politique d’inclure dans la Charte de la Ville un germe de services en français. C’est cet embryon que les tenants d’un bilinguisme plus affirmé s’activent à développer depuis lors afin d’en faire profiter l’ensemble de la population winnipégoise et de participer à consolider notre vivre-ensemble.
Sur le plan géographique, historique, et surtout humain, Winnipeg se révèle une source d’inspiration exceptionnelle pour le dépassement de soi. Une attitude essentielle pour garantir que la vie dans cette ville demeure enrichissante, et que les générations futures puissent continuer de conjuguer solidarité, humanité et compréhension mutuelle, érigeant ainsi Winnipeg en un lieu où la diversité est célébrée et où chacun et chacune, quelle que soit sa trajectoire de vie, peut contribuer à l’épanouissement collectif.