Avec des informations de Raphaël Boutroy

À l’âge de 17 ans, Janine Stephens participe à une classe de karaté. C’est l’été. L’une de se connaissances lui propose de s’essayer à l’aviron.

Nous sommes en l’an 2000 et celle qui s’appelait encore Janine Hanson prend les rames pour la première fois. Et c’est un peu le coup de foudre sur la rivière, comme elle le raconte si bien.

« L’une de mes motivations préférées, c’est qu’il y a toujours quelque chose à améliorer en aviron. Qu’il s’agisse de trouver un meilleur rythme, ou bien d’aller plus vite sur la machine à ramer pendant l’hiver. Et puis ressentir les résultats de notre travail, ça ajoute au défi personnel. »

Cet état d’esprit a marqué le début de sa carrière. « Pour moi, il s’agissait seulement de m’améliorer un peu, puis encore un peu, et voir jusqu’où je pouvais aller. »

Cette recherche constante de l’amélioration va mener Janine Stephens jusqu’à l’équipe nationale canadienne.

Elle a participé aux Jeux olympiques à deux reprises : en 2008 à Beijing et en 2012 à Londres.

Pendant les championnats du monde d’aviron de 2010 et 2011, elle avait pris place sur le podium en deuxième position. Finalement, en 2012 à Londres, après six ans sur l’équipe nationale, l’athlète a remporté la médaille d’argent.

Du point de vue sportif, il s’agit à n’en point douter d’un exploit. Mais à la question de l’intérêt de gagner une médaille d’argent, l’on sent tout de même une légère amertume dans la réponse de Janine Stephens.

Bien qu’il s’agisse d’une légère amertume aux reflets d’or. « Vous savez ce qu’on dit? Avec l’or vous êtes aux anges, avec l’argent vous murmurez : Zut! Et avec le bronze, vous êtes ravi. Je pense que ça résume assez bien la situation de la hiérarchie des médailles.

« Nous avions fait la course de notre vie, nous en sommes d’ailleurs encore fiers. Cette fois-là, nous espérions vraiment battre les Américaines. »

Cette amertume n’aura en tout cas pas terni le bonheur de porter une médaille autour du cou, et de la ramener dans la ville où elle a grandi, à Winnipeg.

« J’étais à la Une du journal le lendemain. J’ai montré la médaille à ma famille en disant : Regardez, on l’a fait! C’était vraiment cool ».

La Rouge formidable

L’olympienne marque une courte pause, comme pour revivre le moment. « Et puis, de pouvoir partager ce succès avec d’autres personnes, c’était vraiment amusant, parce que peu de personnes ont vu en vrai une médaille olympique.

« C’est une partie de l’histoire de ma vie. Et ça reste agréable d’avoir un objet qui symbolise toutes les heures de travail et d’entraînement. »

Janine Stephens confie d’ailleurs que le poids d’une médaille olympique surprend, tant il est lourd. Et s’il est certain qu’elle en est très fière, elle admet tout de même, un brin gênée : « Il faudrait que je cherche dans deux ou trois endroits pour la trouver (rires). C’est parce que nous avons dû emballer des affaires. Mais elle est à la maison, c’est sûr! »

Sa maison, elle est à Winnipeg. Le Manitoba a toujours occupé une place importante dans la vie de la sportive, en particulier pendant ses années de compétition olympique.

« Je revenais aussi souvent que possible. Je me sentais vraiment soutenue ici. Pendant les Jeux olympiques, une séance de visionnage avait été organisée à 6h30 du matin. Je suis passée à la radio tout de suite après ma course et j’entendais tous ceux qui m’encourageaient en arrière- plan. Il y a des gens ici qui ont, en quelque sorte, vécu tout ce parcours avec moi. Et ça, c’est génial. »

Autre atout winnipégois : Winnipeg se prête particulièrement bien à la pratique de l’aviron. Et si c’est un peu par hasard que l’athlète s’était retrouvée sur la rivière Rouge la première fois, le cadre l’a convaincu d’y revenir. Aujourd’hui maman de jumeaux, la « fan inconditionnelle du Manitoba » savait qu’elle s’installerait à Winnipeg.

« La Rouge est formidable pour l’aviron. Elle traverse une grande partie de la ville. Elle est accessible à tout le monde, peu importe d’où l’on vient. C’est d’ailleurs parfois difficile de penser qu’elle coule en plein centre-ville, parce qu’une fois sur l’eau, on a l’impression d’être dans un autre espace. Une sensation que je trouve tellement paisible.

« Nous avons une communauté de rameurs très forte ici. On peut commencer à n’importe quel âge, et pratiquer jusqu’à n’importe quel âge. »

Transmettre la flamme

Depuis 2017, Janine Stephens est l’entraîneuse en cheffe de la Manitoba Rowing Association.

« J’avais déjà fait du coaching comme invitée. Puis en 2016, on m’a proposé de le faire un peu plus sérieusement. Je n’y pensais pas au départ, mais j’étais tellement enthousiaste que mon mari m’a suggéré d’envisager le coaching sérieusement. J’aime travailler avec les jeunes et avoir un impact positif sur leur vie. Les envoyer vers de nouvelles opportunités, à l’université ou dans les équipes nationales. »

De ses expériences aux Jeux olympiques et plus largement de sa carrière sportive, Janine Stephens aura notamment retenu une leçon qu’elle s’efforce d’appliquer dans sa vie de tous les jours.

« Lorsque vous travaillez avec d’autres, votre attitude et votre approche des choses sont cruciales. Pendant ma carrière sportive, je me disais que je voulais être la personne avec qui les autres veulent être dans le bateau. Là, je veux que les gens aient envie de travailler avec moi et de ramer avec moi. J’essaie toujours de maintenir cette attitude positive. »