Une décision saluée par plusieurs. Pour aller encore plus loin, la Division scolaire franco-manitobaine a également instauré une limite de temps d’écran.
L’annonce était attendue. Depuis plusieurs semaines, la question des cellulaires était présente dans plusieurs médias. La Province a annoncé que les cellulaires seraient interdits dans les salles de classe. Le Manitoba est la dernière province de l’Ouest à prendre des mesures sur cette question.
Dans le détail, les élèves de la maternelle à la 8e année n’auront accès à aucun cellulaire que ce soit dans la salle de classe, durant les pauses ou encore durant le dîner.
Le personnel scolaire aussi
Les élèves de la 9e année jusqu’à la 12e année pourront eux utiliser un cellulaire uniquement durant les pauses et le dîner.
De plus, la Province attend des divisions scolaires qu’elles prennent également des mesures pour le personnel scolaire. Des exceptions existent pour les élèves avec des besoins particuliers.
« Les enseignants sont des exemples. Ils sont des modèles. Ils avaient aussi hâte d’avoir le soutien de la province sur cette question. » Nello Altomare.
Des outils de distraction
Sur ce point, le ministre de l’Éducation et de l’Apprentissage de la petite enfance, Nello Altomare précise que « les enseignants sont des exemples. Ils sont des modèles. Ils avaient aussi hâte d’avoir le soutien de la province sur cette question. Parce que beaucoup s’accordent pour dire que les cellulaires n’ont pas leur place dans la salle de classe ».
Le Centre canadien de la protection de l’enfance salue cette décision. « Les preuves s’accumulent sur les effets néfastes de l’utilisation excessive du téléphone cellulaire sur l’apprentissage, le bien-être et la sécurité en ligne des élèves, et cela justifie la nécessité de mesures aussi décisives de la part de nos élus. »
Si la Province est allée de l’avant avec cette mesure, c’est dans une volonté d’uniformiser les pratiques dans les 37 divisions scolaires.
Le ministre, qui a été directeur d’école et enseignant, insiste. « Nous pensons que les écoles sont le meilleur endroit pour apprendre à devenir des citoyens numériques responsables et nous voulons certainement nous assurer qu’ils ont cette possibilité lorsqu’ils sont dans les écoles du Manitoba.
« Beaucoup des applications sur le cellulaire sont destinées à distraire. Elles sont censées attirer les yeux et l’attention des élèves sur elles. Les salles de classe ne sont pas faites pour ça. Les salles de classe sont faites pour apprendre. C’est un endroit où les élèves peuvent aller et se concentrer sur les sujets traités par l’enseignant, au lieu de cette application qui appelle constamment avec des notifications. »
Avant même cette directive du gouvernement provincial, plusieurs divisions scolaires avaient travaillé à mettre en place des directives administratives pour soutenir les enseignants dans leur travail.
« De plus, les élèves se fient beaucoup trop aux correcteurs et aux résultats sur les moteurs de recherches. Ils ont perdu cette habitude d’aller vérifier leur source. » Alain Laberge
Une limite de temps
C’est notamment le cas de la Division scolaire franco-manitobaine (DSFM) qui depuis la rentrée 2023 avait adopté cette politique. En juin 2024, La Liberté faisait le point de cette première année avec le directeur général de la DSFM, Alain Laberge. Il soulignait les retours positifs des enseignants et des élèves. « Chez plusieurs élèves au secondaire, on a pu observer que c’était aussi un moyen pour eux de se sortir de l’hyper-réactivité qu’exige le téléphone. »
Pour la rentrée de septembre 2024, la DSFM a décidé de pousser sa réflexion quant à l’éducation avec les écrans. En effet, désormais, les élèves de la maternelle à la 8e année auront une limite d’une heure de temps d’écran par jour.
Alain Laberge explique ce qui a motivé cette décision. « Nous avons observé que les jeunes ne socialisent plus vraiment dans les salles de classe. Les jeunes sont souvent derrière les écrans.
« Il y a un premier danger que je vois avec ces écrans, c’est la cybercriminalité. Les jeunes sont davantage exposés à de la cyberintimidation lorsqu’ils sont sur les écrans. Nous voulons nous assurer que nos élèves sont en sécurité. »
De plus, Alain Laberge remarque aussi que les habiletés des élèves ont pu être affectées par les écrans. « Il y a plusieurs recherches qui démontrent que l’écriture cursive permet à l’élève de penser davantage à son orthographe et à sa grammaire beaucoup plus qu’un clavier.
« On s’aperçoit aussi que les élèves écrivent de moins en moins. Nous ne sommes pas anti-technologie. Mais il ne faut pas perdre des habiletés de base comme l’écriture au profit de la technologie. La technologie doit être complémentaire. »
Un autre point pour le directeur général de la DSFM était évidemment de favoriser le français dans les salles de classe. « Il y a souvent plus de résultats lorsque vous faites une recherche sur internet en anglais. Pour les élèves, c’était une facilité d’aller vers l’anglais. Mais ce n’est pas nécessairement une bonne chose. »
Pour Alain Laberge, il était aussi question de tout un pan du plan stratégique de la DSFM : celui de la pensée critique. Il fait remarquer que « c’est rare qu’un ordinateur aille à l’encontre de nos propres pensées. C’est le produit des algorithmes. Mais quand vous êtes en discussion avec vos collègues, il va y avoir des gens qui ne sont pas du même avis que nous. C’est quelque chose qui oblige à débattre. Pour nous, le débat est une forme d’expression orale qui doit être soutenue.
Une volonté d’harmoniser
« De plus, les élèves se fient beaucoup trop aux correcteurs et aux résultats sur les moteurs de recherches. Ils ont perdu cette habitude d’aller vérifier leur source. »
L’idée était aussi d’harmoniser les pratiques des enseignants au sein de la salle de classe. « Il arrivait que pour les dix dernières minutes de cours, l’enseignant permette aux élèves de s’occuper sur les ordinateurs. Mais il était rare qu’ils s’en servent pour les cours.
« Et puis, sans directive, les comparaisons arrivent très vite. Les élèves disent : avec madame X, on a le droit de le faire, avec monsieur Y, aussi. Nous voulions faciliter le travail des enseignants. »
Pour prendre cette décision, Alain Laberge s’est appuyé sur des études qui montrent qu’entre la maison et les écoles, un élève peut passer entre six et huit heures de sa journée sur les écrans. « Loin de nous l’idée de contrôler ce qu’il se passe à la maison. Mais à l’école, nous pouvons appuyer nos jeunes dans leur apprentissage. »
Pour les enseignants, la logistique ne devrait pas beaucoup changer comme le suggère Alain Laberge. « Nous avons des chariots avec une trentaine d’ordinateurs. Jusque-là, les enseignants devaient réserver leur créneau pour utiliser les ordinateurs. Rien ne va changer de ce côté-ci.
« Il faut dire que c’est plus simple pour les élèves de la maternelle à la 8e puisque les élèves restent avec le même enseignant toute la journée à l’exception du cours de musique et d’éducation physique où les écrans ne sont pas présents.
« Au niveau du secondaire, on fait appel au bon sens de chacun pour que les élèves ne soient pas sur les écrans toute la journée. »
Alain Laberge tient aussi à souligner que cette limite d’une heure est toutefois flexible. « Il arrive que, pendant une semaine, il y ait un projet de recherche et donc que les élèves passent 1h15 sur l’ordinateur. Eh bien, peut-être que la semaine suivante, on peut rester seulement 45 minutes. Tout est une question d’équilibre. »
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