Le samedi 21 septembre, les éditions du Blé, qui célèbrent cette année un demi-siècle d’existence, lanceront un ouvrage assez remarquable. Dirigée par J.R Léveillé, Poésie franco-ouestienne, 1974-2024, est une anthologie qui rassemble en ses 383 pages pas moins de 50 ans de poésie. On y retrouve en tout, plus de 200 poèmes écrits par 71 poètes aux voix, univers et origines différentes.

Cela fait plus de quatre ans que J.R Léveillé œuvre à la conception de cette anthologie. Selon l’auteur, il était grand temps pour un nouveau recueil de cette ampleur de voir le jour.

Besoin d’une mise à jour

« Le projet a débuté, car je me suis rendu au début du nouveau millénaire que l’anthologie précédente que j’avais éditée en 1990 sur la poésie franco-manitobaine était déjà un peu datée. La plupart des gens que l’on considère comme poètes franco-manitobains à l’heure actuelle n’avaient pas encore publié à l’époque. »

J.R Léveillé fait allusion, entre autres, à Lise Gaboury- Diallo, « qui signe son premier recueil en 1999 », ou encore les petits tirages de Laurent Poliquin « qui n’étaient pas connus avant qu’il ne publie en 2000 ».

« Donc je me suis dit qu’il fallait faire quelque chose de plus contemporain et que tant qu’à faire, autant étendre le projet à tout l’ouest canadien. »

Ce faisant, le projet permettra aussi d’offrir une vitrine aux poètes francophones dont le nom s’inscrit dans les pages de l’anthologie. « Au Manitoba, la visibilité vers l’est du pays est assez limitée et c’est davantage le cas pour nos confrères et consœurs de l’ouest », avec cela en tête, l’idée de rassembler le grand nord-ouest canadien dans un même livre tombait sous le sens.

Le Manitoba, l’Alberta, la Colombie-Britannique, le Nunavut, la Saskatchewan, le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest sont donc représentés. Si la création d’un tel ouvrage peut paraître être une tâche herculéenne, et bien c’est qu’elle l’est un petit peu. C’est pour cette raison que J.R Léveillé s’est entouré de collaboratrices (1).

Un travail collaboratif

« Même si je connaissais plusieurs de ces poètes, je ne suis pas un spécialiste de la situation poétique dans ces provinces. J’ai donc souhaité travailler avec des personnes qui sont à la fine pointe des développements et actions poétiques, des organisations, des spectacles et des lance- ments dans leur province respective. »

Cette collaboration a donc permis d’assurer une totale compréhension du climat poétique de chaque province. La suite logique à cela, c’est qu’elle a également permis d’identifier et de mettre en valeur les spécificités et richesse de chacune.

Une aubaine, car pour l’auteur franco-manitobain, le terme franco-ouestien n’est rien de plus qu’une dénomi- nation géographique. Il était hors de question de présenter la poésie dans l’ouest comme « un bouillon indistinct », mais bel et bien d’en souligner la diversité. Une analogie s’impose alors à J.R Léveillé, celle de la ceinture fléchée.

« Il y a cette variété de tissu et de couleurs et chacune représente une histoire, sym- bolise une vie vécue. Ce recueil, c’est un métissage, plutôt qu’un melting pot. On ne cherche pas à dire que c’est une anthologie de la poésie métisse, c’est une poésie qui est mixte dans l’esprit et non pas par l’héritage. »

Dans cet esprit, les poètes ont été regroupés par province et territoires. « Parce que toutes ces voix contribuent à brosser le portrait de ce qu’est la poésie dans chaque province. »

Une grande valeur culturelle

Du fait de la variété de son contenu, l’ouvrage a donc une valeur culturelle et littéraire indéniable. Par exemple, il permet de réaliser que la présence d’une immigration africaine sur certains territoires a donné lieu à l’apparition d’un style de poésie différent. En Alberta, on retrouve une poésie où la présence de la langue anglaise est très forte et se mêle au français. « On voit aussi que les gens qui sont nés dans l’ouest ont une certaine américanité géographique dans leurs textes alors que ceux qui viennent d’autres pays apportent leurs propres paysages. Ils essaient d’intégrer ces paysages à leur état d’immigrant et tentent de faire une place à leurs paysages dans leur nouvelle géographie. Il y a tous ces enjeux très riches. Qu’ils soient nés au pays ou ailleurs, je pense qu’ils ont tous une histoire à raconter. »

Des histoires qu’il sera donc possible de découvrir dès le samedi 21 septembre lors du lancement de l’anthologie à 17h dans la salle Antoine-Gaborieau du Centre culturel franco-manitobain.

(1) Marie-Diane Clarke, Eileen Lohka, Amber O’Reilly et Claudine Potvin.