Arrivée de France avec sa famille il y a trois ans, Pauline Ambec a su rapidement se faire une place au sein de la communauté franco-manitobaine. Après des moments professionnellement difficiles dans son pays d’origine, la venue au Manitoba a été vécue comme une forme de guérison.

C’est qu’il s’en est passé des choses pour la famille de Pauline Ambec. En moins de trois ans, ses enfants ont grandi à l’École Saint-Joachim, son mari Alexandre Ambec a reçu son diplôme en éducation de la jeune enfance de niveau 2 et quant à elle, elle est devenue il y a quelques semaines la nouvelle directrice générale de Pluri-elles, succédant à Mona Audet, directrice ces 23 dernières années.

En regardant un peu dans le rétroviseur, aurait-elle imaginé de telles évolutions? « Vraiment, pas du tout! Avant qu’on parte, Alexandre me disait : toi, tu vas finir directrice de quelque chose! Je n’aspirais vraiment pas à avoir des responsabilités, j’étais avant tout là pour m’épanouir au niveau personnel et bien sûr professionnel, mais jamais en allant vers des fonctions d’encadrement. »

Pour comprendre cette recherche d’épanouissement, il faut remonter avant la venue au Manitoba de Pauline Ambec et sa famille. Après 15 ans dans le monde de la banque, il devenait urgent de s’arrêter. « J’ai commencé à l’accueil, j’ai gravi les échelons et je suis devenue adjointe d’une petite agence. J’ai fini en burn out, parce que c’était la banque… Donc, ça allait moyennement dans nos jobs Alexandre et moi, et on a eu envie de découvrir autre chose. Le facteur déclencheur a été : si l’on ne le fait pas là, va-t-on le regretter? »

Paradoxalement, le Canada n’était pas la toute première destination en tête. « Il y avait plusieurs dates anniversaires en même temps et pour célébrer ça on pensait à faire un gros voyage. On a pensé à la Nouvelle-Zélande. Ça me faisait rêver et à force de me renseigner, je voulais même y vivre. Mais en regardant aux procédures d’immigration, on a vu que c’était compliqué. Alexandre a alors proposé le Canada, il avait les grands espaces en tête. »

Pauline Ambec a donc regardé pour les processus d’immigration et a aussi pris conseil auprès d’amis français du Manitoba. « Mais, ce qui nous faisait peur, c’était la langue. On n’avait aucune idée qu’il y avait des communautés francophones au Manitoba. Surtout, j’avais peur de déraciner mes enfants et les mettre dans un milieu anglophone. Puis, on m’a parlé de la communauté ici et notamment des écoles de la Division scolaire franco-manitobaine. »

Un cheminement personnel

Embarquer toute une famille de quatre personnes dans un tel changement de vie peut parfois donner des vertiges. Mais Pauline Ambec voit tout ce processus comme une forme de guérison après toute une période d’épuisement professionnel en France. « Après mon burn out, la médecine du travail en France m’a déconseillé de retourner dans un environnement qui était aussi toxique pour moi. J’avais d’autres collègues qui sont allés dans d’autres banques, c’étaient les mêmes problèmes. Mais en quittant ce travail, je me suis dit : je ne sais rien faire d’autre, qu’est-ce que je vais faire? En fait, c’était si toxique qu’on se sent écrasé et qu’on ne sait plus vraiment ce on peut apporter. Mais ce processus d’immigration m’a fait prendre conscience que j’avais des compétences que les autres n’avaient pas. Ça a été essentiel pour moi. »

Pauline Ambec salue d’ailleurs Mona Audet qui a rapidement su identifier ses qualités. « Mona, elle a ce talent pour dire à quelqu’un : toi, tu seras bon dans ce domaine, tu sais faire ça. Elle sait aussi nous pousser un peu en dehors de notre zone de confort pour donner le meilleur de nous-mêmes. Pluri-elles m’a vraiment apporté beaucoup sur ça. »

Évidemment, la famille a aussi connu la plupart des défis qu’on peut imaginer quand on doit s’installer (logement, travail, finances, santé). Mais les difficultés passées ont vraiment rendu la famille résiliente sur beaucoup de points. 

La Broquerie, l’autre évidence

Pourtant, au début, c’est à Winnipeg que devait s’installer la famille Ambec. Mais très vite, l’envie de retrouver un aspect rural, à l’image de la commune de Millau dans le sud de France d’où vient la famille, est devenue majeure. « C’est surtout mon mari qui ne se sentait pas très bien à Winnipeg, alors on a tenté La Broquerie. Finalement, on y est très bien depuis trois ans maintenant. »

C’est aussi plus pratique pour Alexandre Ambec qui travaille au centre d’apprentissage et de garde Les P’tits Brisous, rattaché à l’École Saint-Joachim. 

Pauline Ambec demeure tout de même surprise de la vitesse à laquelle sa famille s’est adaptée à cette nouvelle vie. « Je me souviens très bien qu’au début beaucoup de choses de la France nous manquaient. Des membres de la famille nous demandaient ce qu’on voulait et on leur faisait des listes immenses. Puis, cet été, ils nous ont visités et l’on a été incapable de demander quelque chose à ramener de la France. Il reste que nos enfants sont impatients d’y retourner en vacances, mais ils ne s’y voient pas y vivre. »

Désormais dans une position professionnelle où elle peut aider, elle essaie chaque jour d’avoir impact dans la vie des gens que son organisme, Pluri-elles, soutient. « Dans tout ce qu’on fait, on prend la personne dans son ensemble. On n’aide pas juste les immigrants, c’est toute la communauté francophone. Sachant qu’on est plusieurs employés à Pluri-elles à être passés par ces étapes, on connaît bien les besoins. »