Entre 2014 et 2018, pour le centenaire de la Première Guerre mondiale, les Archives de Manitoba ont mené une campagne qui a permis de renflouer les fonds d’archives en lien avec cette période.
Pascale Hutton, technicienne d’archives : « Chaque semaine pendant quatre ans, sur leur blog Se souvenir de la Première Guerre mondiale (1), l’équipe reparlait d’un sujet en particulier avec texte et photos. »
Stephanie Friesen, archiviste, poursuit : « Les Archives ont aussi organisé diverses expositions de documents qu’on avait, et en les voyant, des familles ont reconnu leurs proches. Elles nous ont alors approchés en nous disant qu’elles avaient d’autres archives à nous donner si on était intéressé. Ça a vraiment permis aux gens de connecter leurs archives aux archives que nous avions déjà, et ça les a motivés à nous les confier.
« Pas plus tard que fin septembre 2024, en trouvant les lettres d’un soldat manitobain, Franck Battershill, sur notre site, quelqu’un nous a contacté pour nous envoyer une photo de sa tombe. On n’en avait pas, alors c’était une chance pour nous! »
Pascale Hutton estime en riant que les Archives du Manitoba « font encore face aux répercussions du confinement, quand les gens étaient bloqués chez eux. Ils se sont mis à faire du ménage, à vider leurs placards, et maintenant ils nous apportent tous leurs documents personnels qui pourraient nous intéresser! »
Quels documents?
À quelques exceptions près, les Archives du Manitoba apprécient toute offre de documents en lien avec les guerres.
« Quand on parle de guerre, on pense bien sûr aux registres administratifs et aux lettres et journaux écrits par les gens sur le front, mais on est tout aussi intéressé par ce qui parle des gens qui sont restés chez eux au Canada, assure Stephanie Friesen.
« C’est important de savoir aussi ce qui se passait à la maison pendant la guerre. Ça fait partie de la même Histoire : le rationnement, les recettes pour utiliser le moins de denrées possible, la hausse des prix qui rendait difficile de chauffer les maisons… Tout ceci était directement lié à la guerre, donc c’est d’intérêt. »
L’archiviste souligne cependant que les Archives du Manitoba n’acceptent « que des documents originaux. Pas de copies, sauf si c’est vraiment un document d’une très grande importance. Mais c’est très rare ». En effet, un document copié perd de sa valeur historique.
Par ailleurs, les Archives du Manitoba ne sont pas encore en mesure d’accepter des documents numériques.
Vos archives
En 2020, les Archives de Manitoba ont également lancé le blog Vos archives – les histoires que nous partageons (2), qui invite à partager ses archives, ses histoires et ses ressentis.
Pascale Hutton explique cette initiative : « On encourage les gens, s’ils trouvent un document qui les touche vraiment dans nos archives, à nous écrire et nous dire pourquoi, puis on publie certaines anecdotes avec la photo du document en question sur des pancartes dans notre bâtisse.
« Ça peut être un ressenti, une connexion personnelle au contenu de l’archive, un document qui a été très important pour telle ou telle recherche, les raisons possibles de partager sont multiples! »
« Une fois encore, ça ouvre des conversations, renchérit Stephanie Friesen. Ça crée des connexions. Ça donne envie aux gens de se replonger dans la découverte d’archives. »
Au Centre du patrimoine
Pour sa part, le Centre du patrimoine compte dans ses archives environ 90 documents en lien avec les deux guerres mondiales, dont beaucoup de photos de soldats.
« Je ne pense pas que le Centre du patrimoine ait déjà fait de campagne spéciale pour aller chercher des dons d’archives de guerre, explique Eva Janssen, archiviste en chef du Centre du patrimoine. Celles qu’on a font souvent partie de fonds de famille plus larges.
« Les archives de guerre ne sont pas hors de notre mandat, mais on n’a pas les ressources humaines pour tout faire. Notre priorité c’est l’histoire et le patrimoine de la communauté francophone dans l’Ouest canadien et des Métis. C’est déjà un mandat énorme. »
(1) Tous les articles de ce blog sont aujourd’hui archivés à l’adresse https://www.gov.mb.ca/chc/archives/ww1blog/index.fr.html
(2) https://www.gov.mb.ca/yourarchives/index.fr.html
Que faire avec vos archives?
Si vous possédez des documents de famille importants, Stephanie Friesen, archiviste aux Archives du Manitoba, recommande pour bien les conserver de « ne les mettre ni au sous-sol, ni au grenier. Un lieu idéal dans une maison, c’est au premier étage, dans une boîte, dans un placard, et la boîte surélevée par rapport au sol.
« Ainsi, vos documents ne seront exposés ni à la lumière, ni aux parasites, ni aux grandes variations de température, ni à d’éventuels dégâts des eaux. »
Elle précise que la meilleure forme de conservation reste encore de confier ses archives aux Archives, si la famille s’y sent prête. « Nous avons tout ce qu’il faut pour conserver toutes vos archives sur le long terme : des voûtes climatisées, des professionnels qui savent comment les manipuler en toute sécurité, etc. »
Les Archives du Manitoba ont un comité de sept personnes, dont la directrice, qui se rencontre chaque mois pour évaluer les fonds de famille et collections que des personnes voudraient déposer, et décider quels fonds sont acceptés et lesquels sont redirigés.
« Quels que soient les documents qu’ils ont, ils peuvent nous contacter et on aura une discussion, précise Stephanie Friesen, qui s’occupe des acquisitions et des communications avec les familles donatrices. On parle de qui a produit ces documents, et selon les documents en question, on se demande si on est la meilleure place pour les garder.
« Par exemple, si ce sont des documents en français au sujet de personnes francophones, leur place serait plutôt au Centre du patrimoine. Pour d’autres, ça pourrait être aux Mennonite Heritage Archives, ou encore parmi celles de l’Université du Manitoba. »
L’archiviste précise qu’il n’est pas nécessaire que la famille au complet signe la donation aux archives. « Chaque situation est unique. Parfois, tous les membres de la famille sont là pour signer. Parfois, on a seulement une personne contact, mais elle inclut le reste de la famille dans toutes nos correspondances par courriel, donc on sait qu’ils sont tous au courant.
« C’est vraiment au choix de la personne en possession des documents, mais le plus souvent, toute la famille est impliquée d’une façon ou d’une autre. »
Stephanie Friesen suggère par ailleurs de « parler aux survivants tant qu’ils sont en vie et leur demander qui sont les personnes sur les photos, puis inscrire ces noms au dos au crayon de mine. Sans aucune information sur une photo, son utilité est limitée ».