Par Jean-Baptiste Gauthier.

Une application pour trouver l’amour, une loi sur le don d’organes obligatoire, et une autre pour imposer des heures de loisirs… Vous n’êtes pas au Parlement du Manitoba, mais bien au Parlement franco-canadien du Nord et de l’Ouest (PFCNO). 

C’est sur un air de violon que le gouverneur général fictif Eric Plamondon a officiellement lancé les débats de cette 32e édition du PFCNO (1). Pour encourager les jeunes dans leur mission, Glen Simard, ministre du Sport, de la Culture, du Patrimoine et du Tourisme, est même passé pour leur adresser un mot d’encouragement. Il n’en fallait pas plus pour qu’ils se lancent dans la joute politique.

Jad Mzabi, étudiant en sciences à l’Université de Saint-Boniface et vice-ministre de cette édition, a été particulièrement marqué par les lois atypiques discutées cette année, notamment celle sur l’amour, le projet de loi C-2. « Je suis dans le parti du gouvernement, et notre ministre de l’Affinité a proposé cette loi qui impose une application d’amour mettant en relation les personnes selon leurs salaires annuels et la couleur de leurs cheveux.

« Je crois que c’est la première fois que je vois un projet de loi comme celui-là, un peu irréaliste. Mais tellement intéressant! Nous avons eu plusieurs débats sur cette loi et le parti de l’opposition a proposé beaucoup d’amendements pour modifier certaines parties, notamment sur l’utilisation d’une pilule de l’amour, vendue dans toutes les pharmacies et épiceries. »

Quand tous les coups sont permis

Membre du parti de l’Opposition, Tristan Gagnon, élève au Centre scolaire secondaire communautaire Paul-Émile Mercier à Whitehorse au Yukon, confie que jouer un rôle de député dans l’Opposition lui a permis d’entrer de plain-pied dans le jeu de la simulation parlementaire. 

« C’est le fun d’être dans l’Opposition, tu peux argumenter davantage et contrer les idées et les lois du parti au pouvoir. Et puis, nous avions une stratégie claire : essayer de tirer les votes du troisième parti de la Chambre, le tiers-parti, qui est le parti politique des fermiers », explique-t-il, ravi de pouvoir parfois s’opposer juste pour le plaisir de contredire. 

Mais au-delà du jeu, pour lui, qu’importe le résultat, l’important est de débattre dans la chambre parlementaire. « C’est sûr que nous étions très heureux de voir nos lois votées et nos amendements acceptés. Mais ce qui nous plaît encore plus, c’est le plaisir d’argumenter et de jouer le rôle d’un vrai élu. »

Dans cette ambiance d’argumentation légèrement fantasque, l’audience a même vu naître une proposition de mariage fictive entre deux députés, dans le but de consolider une alliance au sein de la chambre parlementaire.

Car au PFCNO, convaincre son auditoire devient une véritable mission. Amélie Préville, étudiante en sociologie venue de Colombie-Britannique, en sait quelque chose. 

Tenter de convaincre

Jouant le rôle d’une députée de l’Opposition, elle adore les simulations parlementaires comme le PFCNO, où le débat peut durer des heures sur une même loi, où un amendement est proposé, puis un autre, avant de passer au vote. « C’est une magnifique occasion de comprendre comment sont votées les lois au Canada. Par exemple, il y a un protocole assez strict pour parler dans la chambre parlementaire. Il faut se lever, fermer sa veste, demander à la présidence de l’assemblée le droit de poser une question à un autre député. »

Depuis des années, Amélie Préville multiplie les simulations parlementaires et a saisi l’occasion de cette édition pour faire campagne en tant que future présidente pour le prochain PFCNO. Sa promesse? « Je ne vais pas promettre d’essayer. Mais tout simplement de le faire! ». Son discours a visiblement fait mouche, puisqu’elle a été élue pour diriger la prochaine session en Saskatchewan, en novembre 2026.

Fierté

Louis Prince, député au PFCNO, se réjouit d’ailleurs de cette élection qui amènera le PFCNO dans sa province natale. Fier de son parcours de jeune Fransaskois, il a eu l’honneur d’être élu Premier ministre pour la prochaine édition en 2026. « Ce qui rend l’expérience de la simulation parlementaire aussi mémorable, c’est vraiment le monde que tu rencontres. Dans le nord et l’ouest du Canada, notre francophonie est un peu éparpillée. Vous ne savez pas l’impact qu’un évènement comme le PFCNO peut avoir. En situation minoritaire, c’est incroyable de savoir que nous ne sommes pas seuls. »

Après trois jours d’échanges, de débats, et même de quelques déclarations d’amour, l’heure était venue de clore cette 32e édition du PFCNO, le dimanche 10 novembre. 

(1) Le Parlement franco-canadien du Nord et de l’Ouest est organisé par l’Association franco-yukonnaise, le Comité Jeunesse Franco-ténois, L’Association des francophones du Nunavut, le Conseil jeunesse de la Colombie-Britannique, la Francophonie jeunesse de l’Alberta, l’Association jeunesse fransaskoise et le Conseil jeunesse provincial du Manitoba.

Comment fonctionne le PFCNO?

Au PFCNO, les participants incarnent des rôles de députés ou de membres du cabinet, comme ministre, leader de la chambre ou président. Ils débattent de la même manière que le Parlement du Canada et sont répartis en trois partis fictifs :

Parti gouvernemental : Composé du plus grand nombre de députés, il propose des projets de loi et cherche à convaincre les autres partis de leur importance.

Parti de l’opposition : Propose également des projets de loi, tout en s’opposant aux propositions du gouvernement et en présentant des amendements pour modifier certains aspects des lois débattues.

Tiers-parti : Souvent arbitre, il s’allie avec le gouvernement ou l’opposition selon les débats.

Les projets de loi, enrichis d’amendements, sont ensuite soumis au vote et validés par le gouverneur général.