Avec des informations d’Ophélie Doireau et de Jonathan Semah.

Ce remaniement fait suite à la démission inattendue de vice-première ministre et ministre des Finances, Chrystia Freeland, lundi 16 décembre.

Au total, huit nouveaux ministres ont rejoint le cabinet de Justin Trudeau aujourd’hui.

Si par le passé des différences d’opinions entre le ministre des Finances et le premier ministre ont déjà pu être observées dans la sphère politique canadienne, un remaniement de cette ampleur est tout de même assez « extraordinaire », selon Christopher Adams, professeur associé d’études politiques à l’Université du Manitoba.

« Aujourd’hui, quatre ministres ont été remaniés, et huit nouveaux ministres nommés. Je pense qu’il faudrait chercher longtemps pour trouver un tel nombre de nouveaux ministres nommés en dehors de la formation d’un nouveau gouvernement. »

Parmi les nouveaux visages de ce gouvernement, l’on compte notamment le Winnipegois Terry Duguid député de Winnipeg Sud, qui devient ministre des Sports et ministre responsable de Développement économique pour les Prairies. Pour ce dernier portefeuille, il succède à Dan Vandal qui annonçait au mois d’octobre 2024 qu’il ne se représenterait pas pour les prochaines élections générales.

Pour Christopher Adams, après Dan Vandal, Terry Duguid était le successeur logique.

« Il a été élu en 2015. Il est là depuis longtemps, il a une expertise politique et un long parcours. Terry Duguid a été très visible dans les médias au cours des deux, trois dernières années, notamment sur des questions telles que la qualité de l’eau et les Grands Lacs. »

De son côté Sport Manitoba a indiqué souhaiter la bienvenue à Terry Duguid en tant que nouveau ministre des Sports. « Sport Manitoba se réjouit d’avoir un Manitobain à la barre qui reconnaisse le pouvoir du sport. Ensemble, nous sommes impatients de façonner un avenir où chaque Canadien et Manitobain aura la possibilité de s’épanouir grâce au sport. »

Seul à l’Ouest

Dans ce nouveau cabinet, Terry Duguid devient également le seul ministre à représenter l’ouest et le nord du Canada. Ce qui est un problème en soi.

« Lorsque l’on forme un cabinet, on doit s’assurer d’un certain nombre de choses, rappelle Christopher Adams. Il faut assurer un équilibre dans la représentation des genres, des ethnies, le français, l’anglais. Il faut aussi assurer un équilibre dans les représentations régionales. C’est difficile pour un gouvernement d’être un gouvernement national, s’il n’a aucun représentant des principales régions. » 

Toutefois, cette problématique ne se posera vraiment que si le gouvernement s’inscrit dans le temps, ce qui semble, à en croire l’expert, assez peu probable.

Combien de temps va tenir ce nouveau gouvernement?

Après tout, le chef néo-démocrate Jagmeet Singh a assuré qu’il présenterait une motion de censure lors de la prochaine séance de la Chambre des communes qui devrait se tenir le 27 janvier.

« À moins que le Bloc québécois ne soutienne les Libéraux, ce dont je doute vraiment, je doute que nous arrivions à un budget de printemps. Je serai très surpris si nous dépassions le début du mois de février sans que la Chambre ne tombe. »

Il convient alors de se demander sur les raisons qui poussent Justin Trudeau à s’accrocher au poste de premier ministre. Pour Christopher Adams, le chef des Libéraux pense peut-être pouvoir mener une bonne campagne, mais aussi « il va tenter de gouverner le plus longtemps possible. Il sait qu’il perdrait sûrement une élection maintenant ».

Par ailleurs, Pierre Poilievre, le chef conservateur, annonce avoir déjà écrit à la gouverneure générale Mary Simon et réclame un vote dans les plus brefs délais. « Je vous demande d’user de votre autorité pour informer le premier ministre qu’il doit soit dissoudre le Parlement et convoquer des élections, soit convoquer le Parlement le premier jour qui ne soit pas un jour férié avant la fin de l’année civile, afin de vous prouver, ainsi qu’aux Canadiens, qu’il a la confiance de la Chambre pour continuer à exercer ses fonctions de premier ministre », a-t-il déclaré.

Faut-il blâmer Trump?

C’est quelque chose que l’on a pu lire dans les médias récemment. Des arguments selon lesquels, le récemment élu président des États-Unis, Donald Trump, aurait rendu les choses d’autant plus difficiles pour le gouvernement actuel. Lorsqu’on interroge Christopher Adams sur les raisons qui expliquent que le président américain ait autant d’impact ici, il cite un vieux proverbe canadien « Quand les États-Unis éternuent, le Canada attrape la grippe ».

Alors que Donald Trump a rabaissé ouvertement le Canada en qualifiant le pays de « 51e état » et en faisant référence à Justin Trudeau comme « gouverneur Trudeau » alors que les deux hommes dînaient ensemble en Floride à Mar-a-Lago en novembre.

Pour le professeur associé, cela a eu un impact négatif sur la crédibilité du premier ministre. Enfin, la menace de l’augmentation des taxes douanières de 25 %, elle aussi n’a pas été sans conséquences.

« Lorsque la menace a été formulée, les premiers ministres provinciaux ont fait cavalier seul. Le gouvernement fédéral n’a pas été capable de les rallier pour parler d’une seule voix. Cela donne l’impression que le gouvernement en place est impuissant. »