Une initiative en anglais qui permet de faire la lumière sur une problématique encore trop importante.

À Sainte-Anne, une initiative importante pour la santé mentale des hommes a a vu le jour.

Jeremy Wiens et Ryan Pasieczka ont joint leurs efforts pour créer un groupe de soutien de santé mentale, dans la ville de Sainte-Anne. Le groupe, exclusivement réservé aux hommes de 21 ans et plus se réunissait pour la première fois le 14 janvier dans la salle de rencontre AJ Fiola, à l’entrée de la ville.

Prise de parole

Une première rencontre qui a « dépassé toutes les attentes », de Jeremy Wiens, conseiller pour la ville de Sainte-Anne. Au mois d’octobre, ce dernier avait pris la parole devant l’Assemblée législative du Manitoba. Il s’agissait au départ de faire adopter la Loi sur la semaine de sensibilisation à la santé mentale des hommes (1), c’est désormais chose faite.

Toujours est-il que sa prise de parole, relayée sur les réseaux sociaux a provoqué un certain nombre de réactions qui l’inspirent à faire plus. Mais difficile à mettre un groupe de soutien en place tout seul, c’est alors que Ryan Pasieczka rentre en jeu.

Fraternité

Il y a de ça presque trois ans, Ryan Pasieczka est victime d’un accident et se brise la cheville, l’empêchant de travailler. À ce moment-là, le père de famille ne va pas bien. « J’avais le sentiment que je ne pouvais plus subvenir aux besoins de ma famille, que je les empêchais d’avancer ». Il explique ensuite qu’il a eu la chance d’être entouré par des amis qui l’ont aidé à remonter la pente. « Mais je sais que tout le monde n’est pas entouré comme j’ai pu l’être. Avec ce groupe, je voulais créer une fraternité pour les hommes qui sont seuls car je ne sais pas si j’aurais pu endurer seul cette situation. »

Pour Jeremy Wiens, cette volonté de s’investir pour la santé mentale des hommes, est née aussi de son expérience personnelle. Après son divorce en 2015, Jeremy Wiens se retrouve seul avec la charge de ses trois enfants.

« Il fallait que je comprenne comment j’allais m’occuper d’eux, mais j’étais dévasté par ma séparation. »
S’en suit une période pendant laquelle le conseiller s’isole et finit par chercher de l’aide. « En tant qu’hommes les gens autour de nous ne comprennent pas toujours vraiment la souffrance que l’on peut traverser. J’ai cherché des ressources, mais, une fois encore, en tant qu’hommes, les ressources disponibles visaient souvent à régler des problèmes de colère ou d’addiction. »

L’aide de professionnels

Ryan Pasieczka et Jeremy Wiens se disent tout de même chanceux d’avoir eu les moyens de se tourner vers l’aide de professionnels de la santé mentale.

« J’avais les moyens de payer un psychologue, ce qui représente une somme non négligeable. Mais j’ai pu trouver l’aide dont j’avais besoin pour être un père pour mes enfants. » Et ce n’est pas le cas pour tout le monde.

Effectivement l’accès à la thérapie n’est pas toujours accessible. La couverture de l’assurance est parfois trop mince.

Manon Talbot, psychologue associée, conseille d’en parler à son médecin. « Souvent il y a des groupes de thérapie avec des conseillers ou des psychologues qui se déroulent sur quelques semaines. C’est très bien fait et ce sont des programmes provinciaux complètement gratuits. » Elle précise tout de même que ces initiatives-là sont principalement proposées en anglais.

Un tremplin vers la thérapie

Ce sont là les prémices du groupe de soutien qui a vu une vingtaine d’hommes, de tous âges, se présenter à la première réunion.

« Pour le moment nous prévoyons de nous réunir une fois par mois », indique Ryan Pasiezcka. « Nous allons aussi créer un groupe Facebook sur lequel les gens pourront échanger s’ils en ont besoin entre deux rencontres. »

Il rappelle que Jeremy et lui-même ne sont ni des conseillers, ni des psychologues mais que l’objectif est d’offrir aux hommes qui ne vont pas bien, un espace où ils peuvent l’exprimer librement et où « nous sommes là les uns pour les autres ».

Présentement, le groupe n’offre pas véritablement de ressources à ses membres, mais Jeremy Wiens fait entendre qu’il n’est pas fermé à cette idée. La direction que prendra ce groupe reste donc encore à déterminer.

Au Canada, 75 % des suicides sont commis par des hommes, il s’agit de la seconde cause de décès chez les hommes de moins de 50 ans (2).

Pour la psychologue associée, ce genre d’initiative est particulièrement précieuse.
« C’est une belle initiative. Les hommes qui ne vont pas bien ont tendance à ne pas demander d’aide. Ils vont plutôt se renfermer sur eux-mêmes et vivre ça seuls. Le groupe permettre de briser cet isolement-là. »

Briser l’isolement

En tissant des liens et en échangeant, les hommes en souffrance peuvent se rendre vulnérables, et passer outre une idée préconçue chez les hommes qui a la peau dure : être vulnérable est une honte. De plus, Manon Talbot indique que ce genre de groupe de soutien peut permettre le déclic, et servir de tremplin pour certains d’aller ensuite chercher de l’aide auprès de professionnels de la santé mentale.

« C’est un tremplin dans la plupart des cas, dit-elle. C’est une étape importante que d’aller consulter en thérapie. Souvent d’apprivoiser une étape un peu plus abordable, de voir aussi que d’autres personnes traversent des épreuves similaires et de voir que ces personnes-là sont allées chercher de l’aide ça sert d’exemple. »

Car il est important de rappeler que le groupe de soutien qui a vu le jour n’a pas pour ambition de remplacer une thérapie.

« Ce sont deux choses différentes. Le groupe de soutien est un endroit important où l’on va partager des choses, mais ce n’est pas un endroit dans lequel on peut faire du travail en profondeur et des enjeux plus importants. Mais c’est certain que briser l’isolement est essentiel. »

(1) La semaine de sensibilisation à la santé mentale des hommes est désignée chaque année pendant la semaine précédant le troisième dimanche de juin, soit le jour de la fête des Pères.

(2) Si vous avez besoin d’aide, la ligne 9-8-8 est disponible 24/24, 7 jours sur 7 en français et en anglais.