Dans ce long rapport final réparti en sept volumes, Marie-Josée Hogue confirme néanmoins « des préoccupations légitimes par rapport à des parlementaires ayant possiblement des relations problématiques avec des représentants étrangers ». La commissaire précise néanmoins ne pas avoir « vu de preuve indiquant que des parlementaires conspirent avec des États étrangers contre le Canada. »
Le rapport explique également qu’avoir des suspicions sur certains parlementaires est dommageable et pourrait « affaiblir les institutions démocratiques et les élus », ce qui est « exactement ce que veulent les acteurs menaçants. »
Comme dans son rapport initial, ce rapport final confirme qu’il y a eu des tentatives d’ingérence étrangère dans les processus démocratiques canadiens. En revanche, ces tentatives n’ont pas porté atteinte à l’intégrité des élections générales de 2019 et de 2021.
« L’ingérence étrangère n’a pas eu d’incidence sur le résultat des deux dernières élections générales. Nos institutions démocratiques sont demeurées robustes face aux tentatives d’ingérence étrangères », a dit la commissaire Hogue, dans un point presse suivant la publication de ce rapport.
« Par-dessus tout, ce que j’ai constaté, c’est que le gouvernement a été globalement un mauvais communicateur en ce qui a trait à l’ingérence étrangère », Marie-Josée Hogue.
Plusieurs recommandations
La Chine, l’Inde, le Pakistan ou encore la Russie sont parmi les acteurs cités dans les tentatives d’ingérence. Le rapport détaille certains moyens utilisés par ces pays pour faire de l’ingérence. L’on note les cybermenaces, la surveillance, de la manipulation des processus politique, la répression transnationale ou encore de la mésinformation et la désinformation. « Les acteurs étrangers se livrent abondamment à de la désinformation dans les médias traditionnels certes, mais, et surtout sur les médias sociaux. Distinguer ce qui est vrai de ce qui est faux devient de plus en plus difficile. Et les conséquences qui en découlent sont, à mon avis, extrêmement néfastes (…) La plus grande menace, celle qui je crois menace l’existence de notre démocratie, c’est la désinformation », a souligné Marie-Josée Hogue.
Alors quelles solutions face à cette situation? L’un des volumes de ce rapport propose près d’une cinquantaine de recommandations qui sont regroupées sous trois axes d’effort principaux : la résilience institutionnelle, l’application de la loi et la résilience civique. Dans le détail, il est notamment expliqué que le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) doit améliorer la manière dont il signale les renseignements aux décideurs de haut rang. Le rôle du Conseiller à la sécurité nationale et au renseignement (CSNR) doit être renforcé. Il est aussi recommandé d’améliorer la communication avec le public sur le risque d’ingérence étrangère et les mesures en place pour protéger l’intégrité des élections. « Par-dessus tout, ce que j’ai constaté, c’est que le gouvernement a été globalement un mauvais communicateur en ce qui a trait à l’ingérence étrangère », confirme Marie-Josée Hogue.
En conclusion, la commissaire Marie-Josée Hogue appelle à « ne pas baisser les bras » tout en étant réaliste : « l’ingérence étrangère ne sera jamais complètement éradiquée et il sera toujours nécessaire de la contrer. »
Réactions politiques
Ruby Sahota, ministre des Institutions démocratiques et ministre responsable de l’Agence fédérale de développement économique pour le Sud de l’Ontario, et David McGuinty, ministre de la Sécurité publique, ont réagi au nom du gouvernement fédéral. Ils accueillent « favorablement les conclusions du rapport final, dans lequel on réaffirme que les élections fédérales de 2019 et de 2021 ont été libres et justes ». Tout en ajoutant qu’il est « clair que notre démocratie est confrontée à une menace constante et croissante de la part d’acteurs étrangers qui cherchent à miner notre souveraineté et à déstabiliser nos institutions. »
Par ailleurs, le Fédéral a notamment annoncé un investissement de 44 millions $, à compter de 2025-2026, et 9,8 millions $ en permanence, pour le Bureau du directeur général des élections, « afin de disposer d’une capacité d’enquête suffisante pour se protéger contre les menaces qui pèsent sur le processus électoral. »
Jagmeet Singh, chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), a dit à son « équipe qu’elle devait suivre toutes les recommandations du rapport ». Il encourage aussi « tous les partis politiques à faire la même chose. »
Pour le Parti conservateur, « tous ces éléments prouvent que le gouvernement libéral n’a pas réussi à protéger notre démocratie contre l’ingérence étrangère lors des élections générales de 2019 et 2021. »
Enfin, le chef du Bloc Québécois Yves-François Blanchet retient lui la « grande et imprudente nonchalance du Parti libéral dans la circulation d’information, dans la rétention de l’information, dans la non-information au premier ministre ou la prétention que le premier ministre n’a pas été informé de ceci ou cela, alors que les dirigeants du SCRS (Service canadien du renseignement de sécurité) ont fait des pieds et des mains pour que ça se rende à lui. »