Une histoire de résilience et de passion. Des thèmes qui s’adressent à tous.
La Bohème l’opéra de Giacomo Puccini, basé sur le roman Scènes de la vie de bohème d’Henri Murger viendra clore la saison 2024-2025 du Manitoba Opera.
Au cours de trois représentations, qui auront lieu les 5, 9 et 11 avril, les Manitobains auront l’occasion de découvrir (ou redécouvrir) l’histoire d’amour entre la couturière Mimì et le poète Rodolfo. Dans le Quartier latin de Paris en 1830. Une romance poignante, qui prend racine dans la vie de bohème, d’une bande d’étudiants sans le sou. Chantée en italien, avec une traduction projetée en anglais, c’est la cantatrice Suzanne Taffot, qui tiendra le rôle de Mimì.
Un rôle qu’elle connaît bien, puisque ce n’est pas la première fois qu’elle l’interprète. Suzanne Taffot a effectivement eu l’occasion d’incarner Mimì, en Allemagne, « dans une production diamétralement opposée. Notre metteur en scène là-bas était très avant-gardiste avec une vision très ancrée dans l’art contemporain. »
L’adaptation proposée par le Manitoba Opera et dirigée par Anna Theodosakis se veut plus classique.
Toujours est-il que la cantatrice et Mimì se connaissent bien.
« Pour moi, Mimì est une grande vivante, à l’écoute de ses émotions. Elle est atteinte de la tuberculose et elle est à la recherche de lumière, au sens littéral, mais aussi figuré. Elle cherche de la lumière en amour, un partenaire qui la fera vivre intensément. C’est aussi une personne qui fait tout ce qu’elle peut pour obtenir ce qu’elle veut. Toujours dans le respect de l’autre. C’est une fille résiliente et ouverte aux autres, qui veut vivre à fond. »
Un rôle pour lequel la cantatrice a toujours eu un intérêt. Faut-il en conclure qu’il y’a un peu de Suzanne Taffot en Mimì?
« (rires) Oui assurément! La résilience fait partie de mes valeurs les plus profondes. À travers toute ma vie personnelle et professionnelle aussi. Dans cet art qu’est l’opéra si je ne faisais pas preuve de résilience, je n’en serais pas arrivée jusqu’ici. »
Suzanne Taffot a commencé le chant opératique un peu sur le tard. « C’est à force de détermination que je me suis accrochée et que j’aurai le privilège de chanter à Winnipeg. »
C’est grâce à son talent bien sûr, mais aussi sa curiosité qu’elle a pu entrer dans cet univers. « Je suis née en Espagne, mais j’ai grandi au Cameroun où il n’y avait pas vraiment de chant classique. J’ai été en contact d’abord avec les musiques polyphoniques pendant mes études en droit. »
Elle intègre alors la chorale polyphonique, avec les performances, Suzanne Taffot se heurte à des problèmes de gorge. Née alors la volonté d’apprendre à « mieux chanter », puis la curiosité d’apprendre à lire des partitions. Elle rejoint alors le conservatoire et de fil en aiguille son chemin la mène au Canada où elle poursuit cette voie qui la mènera sur les planches d’opéra un peu partout dans le monde.
Suzanne Taffot a donc su intégrer un univers artistique qui est parfois encore trop méconnu du grand public. C’est d’ailleurs un point que soulève la chanteuse.
« Il y a toujours cette conception un peu erronée d’un opéra élitiste, niche. Je pense au contraire que l’opéra s’ouvre de plus en plus à de nouveaux genres, de nouveaux styles et de nouveaux publics. L’une des missions de l’opéra c’est d’éduquer le public. Il y a des opéras plus contemporains, d’autres qui allient les genres. »
De plus, dans les classiques de l’opéra, au même titre que ceux de la littérature, du théâtre ou de la danse, les thèmes abordés sont toujours d’actualité et peuvent aller chercher une sensibilité auprès de tout individu qui prend la peine de se laisser tenter.
C’est aussi un vecteur de message et de changement.
« Je crois fermement que l’opéra doit être un allié en matière de représentativité. Simplement au niveau de l’affiche (1) de Manitoba Opera pour La bohème, c’est tellement évocateur. Il y a beaucoup de personnes qui peuvent se reconnaître en ça. Moi aussi à travers mon travail, mon rôle n’est pas seulement d’effectuer mon travail d’artiste, c’est aussi de montrer aux jeunes noirs et d’autres communautés que l’opéra est aussi fait pour eux. »
(1) L’affiche représente une femme noire.