Le CDEM travaille à implanter dans la région de Powerview-Pine Falls une industrie inédite au Manitoba, celle du bois lamellé-collé.

La LIberté
Denis Clément veut convaincre les Manitobains des bienfaits de la construction en bois lamellé-collé. En médaillon : une coupe de bois lamellé-collé.

 

Les jours noirs de la région de Saint-Georges-Powerview-Pine Falls, durement touchée par la fermeture de l’usine de pâte à papier Tembec qui avait causé la perte de 700 emplois dans la région, pourraient bientôt toucher à leur fin.

Le Conseil de développement économique des municipalités bilingues du Manitoba (CDEM) y étudie en effet la faisabilité d’une industrie inédite au Manitoba, celle du bois lamellé-croisé.

« La technique du bois lamellé-collé est loin d’être nouvelle dans le monde, mais elle est assez récente au Canada où les habitudes de construction sont plutôt la roche, le béton et le fer, indique l’agent de développement économique communautaire au rural du CDEM, Denis Clément. Elle existe au Québec et en Colombie-Britannique, mais ce serait nouveau au Manitoba. »

Meilleur choix

Denis Clément travaille depuis février 2011 sur le dossier de Powerview-Pine Falls. Il n’a pas pris le choix d’essayer de développer le bois lamellé-collé à la légère.

« Je me suis d’abord faufilé sur plusieurs comités de la région, raconte Denis Clément, puis j’ai organisé en septembre 2011 une visite exploratoire au Québec pour voir ce qu’ils faisaient avec la biomasse, c’est-à-dire ce qui est relié à la transformation de la forêt. C’est une matière première abondante dans la région de Saint-Georges et Powerview-Pine Falls.

« Finalement, le 12 février dernier, on a eu une autre conférence sur le bois lamellé-croisé spécifiquement et ça semble être la meilleure solution pour l’avenir de la région », affirme-t-il.
L’intérêt est d’abord économique. « Cette nouvelle industrie va créer des emplois qualifiés pour tout le monde, dont les Premières Nations, se réjouit l’agent au rural. C’était une exigence des gouvernements. Les Premières Nations pourront aussi toucher des redevances sur leurs terres, qui serviront ensuite à développer leur communauté. »

De plus, les maisons en bois lamellé-collé peuvent se construire à l’usine sous forme de panneaux, qu’il ne restera qu’à assembler sur le site. Ainsi, « c’est un emploi d’été comme d’hiver car tout se fait dans l’usine, ajoute Denis Clément. Il n’est pas dépendant des intempéries ».

Bois lamellé-collé.
Bois lamellé-collé.

L’intérêt est aussi environne­mental. « Avec cette technique, on peut utiliser tous les morceaux de l’arbre du fait que ce sont des lamelles croisées et collées, assure-t-il. Quant aux branches trop petites, elles peuvent devenir une source de chaleur pour le village, moins coûteuse que le gaz ou l’électricité, mais aussi de l’huile ou du diésel. L’utilisation de tout l’arbre était la deuxième exigence qui nous était imposée. »

Enfin, l’intérêt réside dans la qualité de la construction. « Les maisons en bois laminé-croisé sont plus solides et durables du fait des multiples couches de bois, rapides à installer, très isolantes, et elles résistent bien au feu car le bois est très condensé donc il met plus de temps à brûler, ainsi qu’aux tremblements de terre car le bois est plus malléable que le béton », signale Denis Clément.

Tout début

La route est toutefois encore longue avant qu’une usine de bois lamellé-croisé ouvre officiellement ses portes du côté de Powerview-Fine Falls.

« Il faudra compter au moins deux ans et demi, estime Denis Clément. On n’est qu’au début du projet et on doit d’abord signer des ententes avec les communautés, les Premières Nations, les entreprises ou encore les gouvernements. Comme la technique est nouvelle au Manitoba, tout est à faire. »

Il doit aussi faire une étude poussée de faisabilité, s’assurer que le bois du Manitoba est bien compatible avec cette technique, et faire une étude de marché et environnementale.
« Je travaille aussi déjà à faire connaître ce produit aux ingénieurs, aux architectes et aux consommateurs manitobains, ajoute Denis Clément. Je dois réussir à leur faire changer leur façon de faire et de voir les choses. Ça ne se fera pas du jour au lendemain! Et pour cela, mon projet est de faire installer d’ici un an au Manitoba une maison en bois lamellé-collé. Les gens ont besoin de voir pour croire que c’est une bonne technique.

« On a étudié d’autres options pour la région, comme les granules de bois, mais ce n’était pas rentable car le marché n’était pas garanti, conclut-il. Le bois lamellé-collé est vraiment la solution offrant la meilleure valeur ajoutée et qui répondra au besoin énorme de construction de maisons dans la région, notamment pour les Premières Nations. On mise donc là-dessus. »

 

Par Camille HARPER-SÉGUY

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