Depuis son arrivée au Canada en 2017, Karelle Ngassam a vécu à Pointe-de-l’Église et Halifax en Nouvelle-Écosse, à Summerside à l’Île-du-Prince-Édouard, à Ottawa en Ontario et à Iqaluit au Nunavut, où elle réside actuellement. À cette liste s’ajoutera bientôt Yellowknife, capitale des Territoires du Nord-Ouest. Ce n’est pas pour rien que les amis de la Camerounaise d’origine la surnomment « l’oiseau migrateur »!
Par Ericka MUZZO – Francopresse
L’opportunité de venir étudier à l’Université Sainte-Anne, en Nouvelle-Écosse, est comme tombée du ciel pour Karelle Ngassam. « Je n’avais pas vraiment l’ambition de venir au Canada, j’avais plus des vues au niveau de l’Europe », avoue en riant la jeune femme aujourd’hui âgée de 32 ans.
Qu’à cela ne tienne ; lorsque son oncle lui a soufflé qu’il serait possible pour elle de poursuivre ses études universitaires en Nouvelle-Écosse, elle a « fait tout ce qu’il fallait ».
« Quand j’ai obtenu mon visa pour venir étudier au Canada, j’étais vraiment excitée et impatiente! J’ai fait des recherches et j’ai vu que le Canada est un pays bilingue, donc je me suis dit que je pourrais faire d’une pierre deux coups en pouvant parler français et améliorer mon anglais », explique celle qui est aujourd’hui parfaitement à l’aise dans les deux langues officielles.
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« C’est comme si c’était fait pour arriver »
En septembre 2017, Karelle atterrit donc au Canada. Son arrivée n’a pas été de tout repos, mais ce qui la marque encore, c’est l’accueil chaleureux qu’elle a reçu dans la région de Clare.
« [En arrivant] j’ai raté ma correspondance à Toronto, finalement mon vol est arrivé à Halifax vers 20 heures! Clarence, un très gentil chauffeur de l’Université Sainte-Anne, est venu me chercher malgré l’heure tardive. De Halifax à Clare, c’est trois heures de route, donc on a conduit et conduit et conduit! » se souvient Karelle, qui était déçue de ne pas pouvoir apprécier la région en raison de la noirceur.
« Je suis arrivée sur le campus à 23 h 30 et j’ai été reçue par l’Association des étudiants internationaux (AEIUSA) […] Malgré la fatigue et l’heure tardive, il y avait tout un protocole, une logistique mise en place, j’ai eu un très bon accueil! Le lendemain ils sont venus frapper à ma porte et j’ai pu faire le tour du campus de jour », se rappelle encore Karelle Ngassam.
Si la communication avec les Acadiens de la région a été plutôt difficile au début, en raison des accents très différents, avec le temps l’étudiante s’est habituée et s’est rapidement sentie comme chez elle.
« Je ne peux pas dire que j’ai eu un choc culturel parce qu’à la façon dont j’ai été accueillie, je me suis vraiment sentie comme chez moi, en famille! C’est comme si c’était fait pour arriver [son déménagement en Nouvelle-Écosse] », rapporte Karelle.
Grâce à son programme d’études, le baccalauréat en administration des affaires – programme d’éducation coopérative, elle a pu visiter de nombreuses régions du Canada : « Il y a une alternance entre une session de cours théoriques et une session de stage, c’est le top du top pour quelqu’un qui aime découvrir comme moi! »
Elle a donc effectué ses trois stages à Ottawa, Summerside et Halifax. « Des stages très différents, pas du tout la même chose, c’est bien pour la diversité professionnelle », précise Karelle.
De la Nouvelle-Écosse au Nunavut
Lorsqu’elle a gradué en mai 2020, ayant obtenu des équivalences de ses études précédentes, elle a surtout cherché un emploi dans les provinces de l’Atlantique. « Mais avec la pandémie, c’était difficile, donc j’ai commencé à postuler partout au Canada! Pas de limites », explique-t-elle.
C’est finalement via son ancien directeur de faculté qu’elle a entendu parler d’ouvertures de postes au Nunavut : « J’ai postulé, je n’avais peur de rien! Même si j’entendais qu’il faisait -60C l’hiver, j’étais sure que si des gens y survivent, je le pourrais aussi », lance la jeune femme.
Elle a effectué l’entretien d’embauche le 7 juin et le lendemain elle obtenait le poste : « Il m’a fallu quelques jours pour faire mes bagages et me déplacer, et c’était parti! »
Au cours de la dernière année, Karelle Ngassam a donc occupé le poste de coordonnatrice en employabilité et immigration au Carrefour Nunavut, à Iqaluit.
« Au début, j’avais peut-être un peu peur, mais dès que j’ai fait des recherches sur l’endroit, j’ai pu me préparer psychologiquement. Ça aide à ne pas trop avoir de choc, j’avais fait la même chose quand je suis venue au Canada donc je savais à quoi m’attendre! Au Nunavut je savais qu’il y avait une communauté francophone, que les routes ne sont pas goudronnées et qu’il fait très froid en hiver », ajoute-t-elle en riant.
Heureusement, son arrivée au mois de juillet lui a laissé le temps de s’acclimater à l’endroit avant la saison froide, un luxe qu’elle n’avait pas eu à son arrivée en Nouvelle-Écosse.
Malgré tout, Karelle a bien vite constaté qu’elle était à des années-lumière de son Cameroun natal : « C’est vraiment deux mondes complètement différents en termes de climat, de la durée du jour qui peut atteindre 22 à 23 heures en été […] J’ai eu des difficultés au début de l’hiver, ce n’était pas évident parce qu’à partir de 11 h il n’y a pas de soleil, c’est comme s’il était 19 h! »
Encore une fois, elle a pu compter sur l’accueil chaleureux des locaux pour se sentir plus à l’aise. « J’ai reçu beaucoup de conseils de gens qui sont ici depuis longtemps : prendre des vitamines, rester active, ne pas se laisser assoupir par la noirceur à l’extérieur parce que ça nous pousse à dormir 13 heures! » s’exclame-t-elle.
Elle a aussi pu rencontrer plusieurs francophones grâce à l’Association des francophones du Nunavut (AFN), « des gens [originaires] de partout : des immigrants internationaux, des Ontariens, des Québécois […] C’était rassurant d’avoir des gens avec qui parler français, c’était vraiment un plus », assure Karelle.
Une nouvelle aventure à Yellowknife
Dans quelques semaines, c’est à Yellowknife qu’elle poursuivra son aventure, ayant obtenu au poste au Collège nordique francophone. Elle pourra y accueillir et soutenir des étudiants internationaux, comme elle-même l’a été à son arrivée.
« Tout part de la façon dont tu as été accueillie, je suis reconnaissante et j’aimerais rendre le même service! Ça m’a beaucoup marquée », souligne Karelle Ngassam.
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Grâce à la «nouvelle voie» annoncée en début mai par le gouvernement fédéral, sa demande de résidence permanente est en cours de procédures : « C’est une grande opportunité, ça n’est pas donné à tout le monde! D’autres devront attendre d’avoir un an d’expérience professionnelle avant d’appliquer [pour la résidence permanente]. Cette voie est comme tombée du ciel », se réjouit Karelle.
« En moins de 25 heures, l’autre branche [pour les anglophones, NDLR] était complètement remplie, les francophones, on est vraiment privilégiés! C’est une grosse aubaine, j’espère peut-être même avoir ma résidence permanente d’ici décembre 2021 », s’enthousiasme la jeune professionnelle.
Lorsqu’elle compare son parcours avec celui de ses sœurs, qui se sont plutôt établies en Europe comme elle-même le souhaitait initialement, Karelle Ngassam n’a « absolument aucun regret […] Je ne suis pas sure que ce que je vis ici, j’aurais pu vivre la même chose en France ou en Europe! »
« Je ne regretterai jamais mon choix de poursuivre au Canada, c’est une très belle opportunité dont je suis très reconnaissante! Aujourd’hui, je vois les fruits de mon travail, j’évolue et je continue de progresser. J’ai hâte de voir où l’avenir va me mener », conclut-elle, optimiste et impatiente de découvrir le reste du pays, à commencer par Yellowknife.
Au travers des incertitudes liées à la pandémie, certaines histoires ressortent comme autant de bouffées d’air et d’espoir. C’est notamment le cas de nombreux francophones qui ont choisi le Canada comme terre d’accueil, il y a de cela quelques mois ou des années. Chaque samedi, Francopresse vous présente quelques-unes de leurs histoires d’immigration, un clin d’œil à la vie qui continue même quand tout le reste s’arrête.