FRANCOPRESSE – La ministre des Langues officielles a recueilli les demandes de 6 500 Canadiens lors des consultations pour le prochain Plan d’action pour les langues officielles. Consolidées dans le Rapport sur les consultations pancanadiennes sur les langues officielles 2022, les demandes portent notamment sur une augmentation des budgets en éducation et pour les organismes communautaires dans la langue de la minorité ainsi qu’une prise de leadeurship de la part de la ministre.
Inès Lombardo – Francopresse
Ce sont 6 500 Canadiens qui ont participé aux consultations, dont 5 200 ont répondu à un questionnaire en ligne sur la relation qu’ils entretiennent avec les langues officielles et les défis et pistes d’actions suggérées pour rectifier le tir. Des pistes qui serviront à nourrir le Plan d’action pour les langues officielles 2023 – 2028, qui devrait être déposé en mars prochain.
Recherche de l’identité linguistique canadienne
Le rapport indique que 62 % des répondants au questionnaire identifient « la capacité de vivre, d’apprendre et de travailler en français dans la vie de tous les jours comme l’un des cinq plus grands défis des communautés francophones en situation minoritaire ».
Par ailleurs, des intervenants à Sudbury ont demandé à la ministre de donner « une définition commune de “francophone” qui permettrait selon eux une approche normalisée au développement de programmes et à la prestation de services », indique le rapport. Une demande de reconnaitre « l’identité bilingue » a également été formulée pendant les consultations.
Interrogée à ce sujet, la ministre Petitpas Taylor balaie la question de la recherche d’identité linguistique : pour elle, les Canadiens sont « fiers » d’avoir deux langues officielles. « La question d’avoir un pays bilingue est une force, les Canadiens en sont très contents et s’identifient absolument à ça », affirme-t-elle en entrevue avec Francopresse.
À la question de la promotion des langues officielles au pays, le fondement de l’identité canadienne est le premier élément à mettre en avant pour 50,8 % des répondants.
Toutefois, les éléments du rapport montrent davantage un besoin de réponses sur ce qu’est l’identité linguistique canadienne.
Le rapport relève également un déséquilibre : 79 % des francophones consommeraient la culture anglophone alors que seulement 34 % des anglophones se disent « enclins » à consommer des produits culturels francophones. La ministre assure que le projet de loi C-11 sur la radiodiffusion est la réponse, pour avoir du contenu canadien francophone.
Un « rattrapage » pour assurer l’éducation dans la langue minoritaire
L’élaboration de clauses linguistiques précises fait partie des solutions pour un « rattrapage du financement fédéral à l’éducation minoritaire », indique le rapport. Ces clauses devraient être suivies par des mécanismes transparents de reddition de compte. Par exemple, des intervenants ont demandé un financement fédéral de base, pluriannuel et ajusté à l’inflation pour les établissements postsecondaires minoritaires.
Le questionnaire du rapport indique que, pour favoriser l’épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire, l’une des solutions pour 45,1 % des répondants était d’assurer « des occasions d’apprentissage dans leur langue officielle de la petite enfance au postsecondaire ».
Ce chiffre recroise les 44,3 % de répondants pour qui l’appui accru du fédéral à l’apprentissage de la deuxième langue officielle de la petite-enfance au postsecondaire serait la meilleure façon d’encourager cet apprentissage.
Au sein des communautés linguistiques de langue officielle en situation minoritaire, des parents demandent un programme de financement plus structuré, stratégique et à long terme pour les garderies communautaires pour garantir des places aux francophones hors Québec et éviter les listes d’attente.
L’idée de créer un consortium de formation en petite enfance ressort également, à l’image du Consortium national de formation en santé (CNFS). Le but demeure le même : améliorer la formation de base et la rendre disponible partout au pays.
Un « financement de base » dans les organismes et services communautaires
Pendant les consultations, les organismes francophones ont réitéré leur besoin extrême de financement, notamment dans la culture, l’éducation et l’immigration.
Un « plan global pour s’assurer de suivre le rythme de l’inflation » pour les organismes communautaires est l’une des revendications principales, « en particulier à Vancouver et dans les territoires du Nord », précise le document. Une demande qu’avait formulée la Fédération des Communautés francophones et acadienne (FCFA) en octobre dernier.
La Fédération culturelle canadienne-française (FCCF) propose que le prochain plan d’action augmente le financement de base des organismes pour consolider les capacités de l’écosystème artistique et culturel. Les médias communautaires partout au Canada ont fait la même demande, pour « mettre en lumière leur langue ».
En immigration, les organismes de services aux immigrants soulignent aussi un besoin de financement pluriannuel pour « stabiliser leur personnel et les libérer de la nécessité de présenter des projets à court terme ».
Ces organismes ont par ailleurs fait ressortir que, si la cible nationale restait importante, des cibles taillées sur mesure pour chaque province (comme celle de 32 % d’immigration francophone au Nouveau-Brunswick) étaient une piste à explorer.
Un leadeurship à prendre pour Ginette Petitpas Taylor
Le travail avec les gouvernements des provinces et territoires pour assurer l’accès à d’autres services publics (justice, santé, etc.) dans la langue officielle de leur choix vient favoriser l’épanouissement des communautés, selon 48,6 % des répondants.
D’après le rapport, Ginette Petitpas Taylor devrait assurer un rôle de leadeurship des autres ministères du Cabinet de Justin Trudeau, notamment pour les questions de langues officielles dans l’éducation, l’emploi, l’immigration, la justice, la santé, etc.
La ministre Petitpas Taylor assure qu’elle a déjà endossé cette responsabilité de collaborations : « Dans le projet de loi [C-13], nous travaillons en étroite collaboration avec plusieurs ministères. Pour les nouveaux pouvoirs du Commissaire [aux langues officielles, NDLR], je travaille avec le ministre des Transports. De même avec le ministre Fraser pour la politique d’immigration francophone. Avec le Plan d’action, on travaille avec ces ministères pour assurer ce leadeurship. Ce sera une récapitulation des priorités des intervenants ».
ENCADRÉ
Les femmes canadiennes allochtones de 35 et 54 ans, majoritairement de l’Ontario (41,6 %) constituent le groupe ayant participé le plus activement au questionnaire.
Un peu plus de 70 % des 5 200 répondants en ligne ont estimé que le fait d’apprendre les deux langues officielles contribue à une meilleure compréhension entre Canadiennes et Canadiens. Mais, à peine la moitié pensent que les langues officielles les rassemblent.