« C’est assez rare de voir un professeur de droit directement nommé à la Cour d’appel fédérale, souligne Me Guy Jourdain, ancien directeur général de l’Association des juristes d’expression française du Manitoba (AJEFM) au temps où Gerald Heckman en était le président. D’habitude, ce sont plutôt des praticiens du droit, avec une expérience de plaidoirie devant les tribunaux, qui y sont nommés.
« Mais Gerald Heckman a d’excellentes compétences théoriques dans son domaine, le droit administratif et les relations entre les citoyens et l’appareil gouvernemental, et c’est justement de ce domaine que traite la Cour d’appel fédérale. Il a gagné plusieurs prix d’excellence comme professeur.
« De plus, il a le bon tempérament pour devenir juge. C’est un vrai gentleman. Il est patient, pédagogue, et il prend vraiment le temps d’écouter toutes les parties. »
Le bilinguisme comme atout
Selon le juriste, son bilinguisme et le fait qu’il représente l’Ouest ont aussi pu jouer en sa faveur, puisque la juge originaire du Manitoba, Marianne Rivoalen, laisse elle-même son siège à la Cour d’appel fédérale pour devenir juge en chef du Manitoba.
Cette dernière devient pour sa part la première femme juge en chef du Manitoba. « Elle a des états de service impeccables comme juge, et beaucoup d’expérience, commente Guy Jourdain. En droit de la famille à la Division de la famille, en droit autochtone, mais aussi en droit administratif à la Cour d’appel fédérale. Ce sera un grand atout de l’avoir comme juge en chef du Manitoba. »
Ces deux nominations sont d’excellentes nouvelles pour l’avenir de la justice en français. Guy Jourdain explique : « Gerald Heckman est un parfait bilingue, autant à l’aise en français qu’en anglais. Il a vraiment le français et l’accès à la justice en français à cœur.
« D’ailleurs c’est lui qui a, peu de temps après son arrivée au Manitoba, lancé le premier cours de français juridique à l’Université du Manitoba avec la professeure Lorna Turnbull. Plus tôt cette année, le sénat de l’Université du Manitoba a approuvé la création d’un programme de concentration en études juridiques en français de 30 crédits. »
D’autres nominations à prévoir?
Quant à Me Marianne Rivoalen, « elle est aussi parfaitement bilingue et a été très active dans la communauté franco-manitobaine, donc elle connaît bien les enjeux de notre communauté et elle a très à cœur l’accès à la justice en français ».
Il souligne en outre que le fait qu’une Franco-Manitobaine prenne la suite du Franco-Manitobain Richard Chartier au siège de juge en chef du Manitoba est une autre bonne nouvelle pour les francophones : « Ça enracine la tradition des juges en chef bilingues au Manitoba », affirme Guy Jourdain.
Il ose même en espérer davantage. « Avec l’AJEFM, on avait non seulement demandé deux nominations bilingues à la Cour d’appel, mais aussi à la Cour du Banc du Roi, en particulier quelqu’un(e) de spécialisé(e) en droit de la famille, car on anticipait des sièges vacants. Après ces deux nominations de personnes parfaitement bilingues, j’ai bon espoir qu’on verra d’autres nominations bilingues dans un délai raisonnable. »