Timothée Loubière – Francopresse

La pandémie, couplée à l’essor des pratiques numériques, a changé notre façon de travailler. Les entreprises ont dû s’adapter pour rester compétitives, en adoptant notamment le travail à distance.

Les organismes à but non lucratif (OBNL) ont également dû faire preuve de souplesse, avec des moyens souvent moindres, pour s’accommoder de cette nouvelle réalité.

« Avec la pandémie, on a fait un virage numérique très très rapide », confie Léonore Bailhache, responsable des communications, du marketing et du développement des publics du festival littéraire Frye, qui se déroule chaque année à Moncton.

« Pour notre édition 2020, on a mis en place des évènements virtuels sur Facebook Live. Ça n’avait pas été très facile parce qu’à cette époque-là, on n’avait pas les outils ni l’expertise pour développer tout ça. Mais ça s’est quand même très bien passé », assure-t-elle.

Du rattrapage à faire                     

À la Fédération culturelle canadienne-française (FCCF), cette période pandémique a permis de faire la lumière sur les retards que les OBNL francophones avaient pris en matière de transition numérique.

« Ce retard avait des conséquences qui pénalisaient les artistes, mais aussi pour les financements, parce que de plus en plus de programmes ont des composantes numériques », explique Marie-Renée Duguay, gestionnaire de projet de la Bande numérique de la FCCF.

« Les organismes culturels canadiens n’étaient pas compétitifs par rapport à ceux du Québec, qui investissait depuis 20 ans dans le virage numérique alors que les autres provinces le faisaient très peu, et encore moins en français », ajoute Marie-Renée Duguay.

C’est de ce constat qu’est née la Bande numérique.

L’objectif était clair : offrir gratuitement aux organismes francophones les outils pour les aider à se développer numériquement.

« On avait un diagnostic numérique avec plein de questions sur les outils et les stratégies des organismes participants », décrit Marie-Renée Duguay.

« Après trois ou quatre sessions d’information, on assignait [aux organismes] un conseiller numérique qui révisait [le diagnostic] avec eux et leur donnait une feuille de route, poursuit-elle. Suite à ça, on leur offrait 10 heures d’accompagnement avec un conseiller pour démarrer leur feuille de route et jusqu’à 50 heures d’accompagnement avec des experts extérieurs. » 

À cela s’ajoutaient les 23 formations proposées à un rythme soutenu pendant toute l’année, ainsi que la création d’une communauté de pratique sur Facebook, où les membres peuvent « échanger, poser des questions et partager des bonnes pratiques ».

Au total, 43 organismes – dont 12 de la FCCF –, répartis dans 3 cohortes différentes, ont profité de l’aide fournie par la Bande numérique.

Retours d’expérience très positifs

« On est extrêmement satisfaits d’avoir pu bénéficier de cet accompagnement-là complètement gratuitement. C’est un cadeau incroyable, soutient Léonore Bailhache. On n’est pas expert, et il y a plein de pratiques externes ou internes qui avaient besoin d’amélioration. Notre nouvelle plateforme Web est un des résultats. »

« Séraphin Vandegar [un des trois conseillers de la Bande numérique] nous a incroyablement aidés à identifier quels étaient nos besoins et comment faire en sorte que [notre plateforme] soit fonctionnelle », déclare Léonore Bailhache.

Élise Anne LaPlante et Véronique Leblanc ont commencé les formations peu de temps avant de prendre la codirection de l’Association des groupes en arts visuels francophones (AGAVF) en février dernier.

Si elles n’ont pas encore lancé de grands chantiers numériques depuis leur entrée en fonction, les codirectrices estiment tout de même que la Bande numérique leur a permis de commencer du bon pied.

« On a optimisé certaines choses, comme les envois d’infolettres, la rédaction d’une politique éditoriale pour nos réseaux sociaux ou le transfert de nos archives vers l’infonuagique. Ce sont des choses très concrètes qui améliorent notre manière de communiquer », se réjouit Véronique Leblanc.

« Ce qui a permis d’aller aussi loin, c’est la partie accompagnement par des consultants, est d’avis Élise Anne LaPlante. Ça nous a été particulièrement utile, parce qu’on pouvait cibler nos besoins. Ça nous permettait de mettre en perspective ce qui était à faire. »

Elle précise même que « quand on bloquait, on pouvait reparler avec cette personne-là, dénouer l’enjeu et continuer d’avancer. C’était bien parce qu’on pouvait comprendre ce que l’on faisait et pas juste se le faire dire. »

De l’aveu de Marie-Renée Duguay, cet accompagnement a même fait plus que donner des outils numériques aux OSBL.

« Beaucoup d’organismes nous ont dit que faire un diagnostic numérique, c’était comme faire une minithérapie. Pour bien t’en servir, il faut que tu te poses les bonnes questions. Quels outils on utilise, mais aussi pourquoi on les utilise? Ça a un impact sur le numérique, mais aussi sur tout ce qui est gestion du changement. Ça force les organismes à regarder leur processus. »

Phase 2 bonifiée

Bonne nouvelle pour les participants au programme et pour ceux qui souhaiteraient en bénéficier : la Bande numérique a obtenu 500 000 $ de financement annuel pour les deux prochaines années grâce au Fonds stratégique de Patrimoine canadien.

Pour cette deuxième phase, quelques modifications ont été apportées au programme. « On veut que chacun des organismes membres de la FCCF puisse avoir un vrai plan numérique. Et on va leur offrir l’occasion d’accueillir chez eux un atelier ou une conférence sur le numérique », annonce Marie-Renée Duguay.

« On va étoffer le travail fait avec les organismes de la phase 1 en leur offrant 150 heures additionnelles. Les nouveaux auront le droit à 200 heures », ajoute-t-elle. Ainsi, 15 OSBL par an pourront profiter du soutien de la Bande numérique, en plus des 12 affiliés à la FCCF. Trois nouveaux conseillers numériques seront également recrutés