C’est une réelle bouteille à la mer numérique que Christophe Geffroy envoie en ce 30 juin 2023. Dans sa publication, celui qui vit en Bretagne détaille sa situation et plus particulièrement le parcours de son arrière-arrière-grand-père, Guillaume Gaffray. Dans les grandes lignes, on apprend qu’il a eu deux fils en France et a décidé de partir seul au Canada dans les années 1880 pour « chercher fortune “aux Amériques” ». On apprend également qu’il avait promis « de revenir chercher ses enfants une fois fortune faite. Mais il semble qu’il ne donnera jamais de nouvelles ». Enfin, Christophe Geffroy explique que son ancêtre s’est remarié en 1888 à Saint-Pierre-Jolys, avec Marie Élise Cécile Vinet.
Plus d’un siècle plus tard, pourquoi le Français a eu envie d’en savoir plus sur son histoire familiale? « Ça faisait longtemps que je voulais poser cette question. C’est une histoire dont on parle dans ma famille depuis que je suis petit. Mon grand-père parlait souvent de son grand-père, Guillaume Gaffray. La vie a dû faire qu’il n’a pas pu revenir. Et pour la “fortune”, je ne sais pas s’il a réussi. Il était agriculteur, c’était la profession qu’il exerçait. Mais je crois qu’il a trouvé un autre bonheur familial. Après s’être remarié au Canada, il a eu six enfants. »
« On m’a même partagé quelques photos d’archives de Guillaume, j’étais vraiment très ému. Ici, dans notre famille en France, on n’a aucune trace de lui. Pouvoir mettre un visage sur un nom, ça m’a vraiment touché. »
Christophe Geffroy
Des réponses au Manitoba
C’est notamment grâce à des sites web spécialisés en généalogie que Christophe Geffroy apprend que son ancêtre a vécu à Saint-Pierre-Jolys. Avec cette information, cela est devenu plus facile pour lui pour écrire directement son message sur un groupe composé de francophones du Manitoba. Et, en effet, sa déduction a été bonne, car seulement quelques heures et jours après son message sur les réseaux sociaux, plusieurs Manitobains répondent à l’appel et découvrent eux aussi des cousins éloignés en France.
Parmi les familles manitobaines qui retrouvent des liens avec Christophe Geffroy, on trouve le nom Gosselin. Coïncidence ou non, Régis Gosselin avait lui aussi tenté il y a quelques années de faire le chemin inverse. En 2015, il était allé en Bretagne pour essayer de trouver quelques informations sur Guillaume Gaffray, son arrière-grand-père.
« C’est une très belle région, mais nous n’avions rien trouvé. Et ça ne m’étonne pas, car il ne portait pas le même nom de famille au Canada et en France. »
C’est en effet l’un des points décisifs qui a rendu les recherches plus compliquées. Dans un document d’identité que nous a partagé Christophe Geffroy, on découvre en effet des erreurs dans le nom de famille de Guillaume Gaffray. Né Guillaume Geffroy, son nom a été écrit Jaffray à la naissance. Lors de son premier mariage en France, il est devenu Joffray puis pour son second mariage au Canada, cela a de nouveau été changé en Gaffray. « Ce qui peut expliquer ses erreurs d’orthographe, il faut revenir à l’époque de la naissance de Guillaume. Il est né en 1851 et à ce moment-là, les gens modestes surtout parlaient plus le breton que le français. Et il y a peut-être eu un problème de compréhension à la déclaration de l’enfant. »
Lina Le Gal a aussi répondu à la publication de Christophe Geffroy. Sa mère, Edmée, était la petite fille de Guillaume Gaffray. Comme Régis Gosselin, Lina Le Gal parle de « surprise » et de « découverte » quand elle a appris que Guillaume Gaffray avait déjà une famille en France. Avec ses cousins, elle s’est lancée d’ailleurs dans la reconstitution de la généalogie de son ancêtre. « Ça nous aidera à avoir et comprendre plus de détails sur sa vie en Bretagne notamment. On est donc dans une ambiance de recherche pour savoir qui était cet homme et quel caractère il avait. »
Surprises et découvertes
Très vite, les échanges entre Régis Gosselin et Christophe Geffroy deviennent concrets. L’un et l’autre apprennent des choses différentes. « Depuis, tout le monde dans ma famille est très intéressé par cette histoire pour savoir ce que notre ancêtre est devenu. Puis, on veut aussi en apprendre plus sur les familles qui sont maintenant au Canada. On a parlé des Gosselin, il y a aussi les Gaffray donc et les Vinet », souligne Christophe Geffroy.
Même constat pour Régis Gosselin qui partage ce qu’il apprend avec le reste des familles au Manitoba. « C’était déjà une grande surprise de savoir qu’il avait une famille en France, je n’étais pas du tout au courant. J’ai donc appris que j’avais plein de nouveaux cousins! On essaie aussi d’en apprendre plus sur sa vie avant de venir en Amérique du Nord. »
Guillaume Gaffray est décédé en 1931 à l’âge de 79 ans à De Salaberry. Régis Gosselin admet donc ne pas connaître beaucoup de choses sur lui. « Il est mort bien avant ma naissance. Ce que je connais de lui, je l’ai appris par mon père et mes oncles. Et finalement, j’ai commencé à vraiment m’y intéresser, il était déjà trop tard pour en discuter avec mes aînés. Ça me fait donc vraiment plaisir de voir tout ce qui se passe maintenant. Et je vise maintenant un retour en France pour rencontrer cette famille et résoudre peut-être certains mystères. »
De son côté, Christophe Geffroy, 55 ans, souhaite aussi faire ce voyage outre-Atlantique. Le Français ne cache pas d’ailleurs une certaine émotion depuis qu’il a commencé à échanger avec les familles manitobaines. Cette histoire est pour lui l’occasion de découvrir toute une autre facette de la vie de son ancêtre. « On m’a même partagé quelques photos d’archives de Guillaume, j’étais vraiment très ému. Ici, dans notre famille en France, on n’a aucune trace de lui. Pouvoir mettre un visage sur un nom, ça m’a vraiment touché. Je souhaite voir où il a vécu, voir sa sépulture pour me recueillir. »