Suivant les récits, il est possible que Grand-mère Lune prenne plus d’importance que Mère Terre. Toutes deux sont féminines et expliquent le rôle crucial que jouent les femmes dans la protection de l’eau.
Nora Whiteway, Aînée de la Première Nation Wasagamack, partage un peu de son savoir traditionnel quant au lien si précieux qui peut exister entre les femmes et l’eau.
« Auparavant, les Anciens savaient à quel point l’eau était liée à Grand-mère Lune. Les changements qui survenaient à chaque passage de la lune indiquaient les périodes de plantation, de récolte, de chasse et de cueillette. La lune déterminait donc notre calendrier, les mois et les changements de saisons.
« Grand-mère Lune veille sur les eaux de la Terre. La vie aquatique se reproduit selon les cycles de la lune. Grand-mère Lune contrôle aussi la vie féminine, parce qu’elle régit le cycle de purification de la femme. Notre cycle naturel de menstruations est connu sous le nom de temps lunaire. »
« L’eau est synonyme de vie »
Cette période est connue pour être un temps de pouvoir. Les femmes peuvent s’adresser à Grand-mère Lune pour être guidées dans la vie. C’est un temps qui rapproche les femmes et où elles sont célébrées puisqu’elles peuvent donner la vie. Nora Whiteway poursuit :
« Si Grand-mère Lune veille sur les eaux de la Terre, les femmes veillent sur les eaux du peuple. L’eau est synonyme de vie. Lorsqu’une femme est enceinte, le bébé est entouré d’eau. Tout est relié à l’eau. Notre corps ne pourrait pas vivre sans eau. »
Carol McBride, présidente de l’Association canadienne des femmes autochtones, ne peut que confirmer ce lien entre création de la vie et protection de l’eau.
« Les femmes portent les enfants dans leur corps et ils sont entourés d’eau. C’est le point de départ de la création. Nos croyances se basent sur ce point de départ de la création.
« Comme femmes, nous sommes les gardiennes de l’eau, les protectrices légitimes, les soigneuses de l’eau qui soutient la vie. Nous avons une responsabilité de protéger l’eau. Nous devons la prendre de manière sérieuse. »
Donner la vie et la protéger
Si Carol McBride est si insistante, c’est que pour elle, il y a une continuité entre prendre soin de l’enfant dans son corps et prendre soin de lui sur Terre.
« L’enfant est entouré d’eau dans le corps de la femme. Cette même femme est responsable pour le développement de l’enfant en faisant attention à ce qu’elle met dans son corps. Cette responsabilité continue le reste de notre vie, elle s’étend à ce que la prochaine génération ait accès à de l’eau potable, à des infrastructures pour leur développement spirituel et physique. »
Il est donc naturel que ce soient les femmes qui portent l’eau dans les cérémonies traditionnelles, comme l’explique Nora Whiteway.
« Parce que les femmes veillent sur les eaux de la Terre, elles en sont responsables durant les cérémonies de l’eau. Cependant, lorsque les femmes sont dans leur période lunaire, leur pouvoir est le plus fort et elles ne préparent pas de nourriture ou de médicaments, ne participent pas aux cérémonies et n’utilisent pas les pipes et d’autres objets sacrés. Non parce qu’elles sont marginalisées, mais parce que nous reconnaissons un pouvoir plus fort lors de cette période. »
Cependant, ce savoir n’est pas toujours reconnu, notamment avec des décideurs publics qui n’impliquent pas les femmes autochtones dans les processus de consultations, comme le suggère Carol McBride.
Implication dans les décisions
« Avec la pollution et les changements climatiques, il est devenu évident que protéger l’eau est de plus en plus difficile. Pour faire mieux, les femmes autochtones qui possèdent un savoir sur l’eau devraient être impliqués à la table des décisions.
« C’est ma mère qui m’a enseigné tout ce que je devais savoir sur l’eau, sur l’importance d’une telle ressource, sur son utilisation, sur sa préservation, sur son apport. Les femmes ont donc un rôle clé à jouer pour la préservation de l’eau. »
Initiative de journalisme local – Réseau.Presse – La Liberté