De par sa volonté de développer des espaces inclusifs, l’organisme peut aussi s’honorer d’obtenir un réel impact social.
À l’Université de Toronto, au début des années 1960, un chercheur canadien du nom de Frank Hayden commence à s’intéresser aux effets de l’exercice physique régulier sur l’état d’être des enfants ayant une déficience intellectuelle.
Les croyances de l’époque associaient la déficience intellectuelle avec l’impossibilité de pratiquer un sport. Le chercheur pionnier prouve au contraire que si on leur en donne l’occasion, ces personnes sont capables d’améliorer leur condition physique et d’acquérir les compétences nécessaires à la pratique et la maîtrise d’un sport.
En se basant sur les travaux de Hayden, Eunice Kennedy Shriver, philanthrope américaine et sœur du président américain John Fitzgerald Kennedy, a fondé le mouvement des Olympiques spéciaux.
La notion d’inclusion fait depuis longtemps partie des valeurs que prône le sport. Les équipes, tout comme les compétitions internationales, rassemblent et opposent, dans un esprit sportif, des personnes d’horizons différents.
Ouverture et inclusion
Cet aspect d’ouverture s’est davantage renforcé avec la création des Jeux paralympiques en 1960 et des Olympiques spéciaux à Chicago en 1968.
Les deux compétitions, reconnues par le Comité International Olympique, reflètent des enjeux similaires. Pourtant, Melissa Suggitt, la responsable marketing d’Olympiques spéciaux Manitoba, souligne qu’elles sont bien distinctes.
« Pour participer aux programmes des Olympiques spéciaux, les participants peuvent présenter une déficience physique. Mais il faut qu’ils aient une déficience intellectuelle sur le plan cognitif ou du développement. »
Du côté paralympique, cette obligation n’existe pas. Sont acceptés les athlètes qui s’inscrivent dans les catégories suivantes : amputation, paralysie cérébrale, déficience visuelle, lésion de la colonne vertébrale, déficience intellectuelle et autres déficiences non incluses dans les catégories mentionnées.
Pour faire simple, les deux organisations acceptent à la fois les personnes présentant des déficiences physiques et intellectuelles. Toutefois pour les Olympiques spéciaux, il faut nécessairement présenter une déficience intellectuelle.
Melissa Suggitt développe les éléments à distinguer. « Dans notre approche, nous avons aussi quelques différences par rapport aux Jeux paralympiques. Nous avons ce que nous appelons des divisions.
« Nous pouvons avoir trois ou quatre divisions pour une même course et nous nous assurons ainsi que nos athlètes aient une chance de concourir équitablement contre des athlètes qui sont du même calibre avec des compétences similaires. L’idée c’est que chacun se sente inclus et ait une chance de gagner. »
Assurer un espace aux athlètes
Pour les sports individuels, les athlètes sont répartis selon leur genre, leur âge et leur habilité. Le site Olympiques spéciaux Canada indique que l’écart de performance maximal recommandé entre athlètes d’une même division soit fixé à 25 %.
Enfin, les compétitions des Olympiques spéciaux, contrairement aux Paralympiques, ne sont pas calées sur les dates de tenue des Jeux olympiques. Melissa Suggitt précise : « Les nôtres sont décalés d’un an par rapport aux Jeux olympiques. Nos prochains Jeux olympiques spéciaux auront lieu en 2025. »
Cependant, comme pour les Jeux olympiques, des jeux sont organisés tous les deux ans et alternent entre Jeux d’hiver et Jeux d’été.
Pour ce qui est de la palette de sports représentés lors des compétitions, elle s’avère assez large, puisqu’elle en compte 18.
« Au Manitoba, nous offrons 17 sports. Cependant, tous ne sont pas reconnus au niveau national. Par exemple, nous avons une équipe de hockey en salle. Mais elle ne participe pas aux compétitions nationales ou mondiales.
« Autre réalité : toutes les provinces n’offrent pas les mêmes sports. Au Manitoba, il est difficile d’offrir la pratique de la voile comme en Il fallait en tout cas s’assurer de proposer une grande variété de sports, car Olympiques spéciaux Canada ne compte pas moins de 49 000 athlètes. Plus de 2 000 d’entre eux sont Manitobains, dont certains sont francophones. La logique des chiffres fait que la couverture médiatique est devenue plus importante au cours des dernières années.
C’est l’heureux constat que tire Melissa Suggitt. « C’est réconfortant de voir un intérêt grandissant pour nos évènements. Par exemple, ESPN et TSN ont diffusé les Jeux olympiques spéciaux. Les Jeux nationaux ont été diffusés en direct.
Hausse de la couverture médiatique
« Je travaille dans le domaine depuis près de dix ans, et j’ai vraiment pu observer une augmentation de la couverture médiatique. Une évolution assurément très encourageante. »
D’autant plus qu’à travers le sport, c’est surtout l’espace et la visibilité offerts aux athlètes qui se hissent au premier plan. « L’essentiel, ce sont les athlètes, la communauté et le sentiment d’appartenance. Il s’agit à la fois de leur offrir un endroit où ils peuvent participer et développer leurs capacités athlétiques et où ils peuvent montrer qu’ils comptent, et ainsi se sentir valorisés. »
Pour l’athlète Camryn Grant, c’est bel et bien le sentiment d’appartenance qui compte le plus. À l’école, elle jouait au badminton et au volleyball. Le sport faisait partie intégrante de sa vie et à la fin du secondaire, les au revoir ont été difficiles.
« Je n’avais plus vraiment de moyens de pratiquer des sports. Pour moi, c’était compliqué de participer à des programmes généraux, avec des personnes sans déficience intellectuelle. »
Sentiment d’appartenance
Camryn Grant vit avec une déficience intellectuelle légère. « Ce qui signifie simplement que certaines choses sont plus difficiles pour moi. Il m’est plus difficile de comprendre ce dont j’ai besoin pour pratiquer un sport ».
En 2018, elle rejoint les Olympiques spéciaux. Elle découvre alors le ski de fond et le curling. Une découverte qui va changer sa vie pour le meilleur.
« Avant de commencer les Jeux olympiques spéciaux, je n’avais pas vraiment d’amis. J’ai trouvé mes meilleurs amis grâce au curling.
« Les Jeux ont beaucoup compté pour moi, car après le secondaire, je n’étais pas certaine de pouvoir pratiquer à nouveau un sport. Pouvoir sortir chaque semaine, être avec mes proches et concourir, ça signifie énormément pour moi. »
En raison de la pandémie, Camryn Grant n’a pas encore eu la chance de concourir sur la scène internationale. Mais elle n’a pas perdu cet objectif des yeux.
La naissance des Jeux paralympiques
Après la Seconde Guerre mondiale, en 1948, un hôpital militaire situé à Stoke Mandeville, près de Londres, accueille des vétérans paraplégiques en fauteuil roulant.
Ils sont sous la garde et les soins du neurologue allemand Sir Ludwig Guttmann. Ce dernier cherche un moyen d’accélérer le rétablissement de ses patients. Et alors que les Jeux olympiques se disputent dans la capitale anglaise, il imagine des épreuves sportives pour ses patients.
Ces derniers s’affronteront au tir à l’arc et au netball, qui est un dérivé du basketball. En 1952, d’anciens combattants néerlandais font le déplacement pour affronter les Britanniques, les Jeux internationaux de Stoke Mandeville sont nés et se tiennent chaque année.
De plus en plus d’équipes et de nations rejoignent la compétition, en 1960, la 9e édition des Jeux de Stoke Mandeville se déroule à Rome, six jours après la fin des Jeux olympiques. En tout, 400 athlètes et 23 nations s’affrontent dans huit disciplines, on parle ici de ce que l’on considère comme les premiers Jeux paralympiques.
Initiative de journalisme local – Réseau.Presse – La Liberté