Avocate anishinaabe-métisse originaire du territoire visé par le Traité n°1, professeure agrégée de droit, et chercheuse dans les domaines des traditions juridiques autochtones, des traités et de l’eau (1), Aimée Craft a publié en 2021 en anglais un livre pour enfants expliquant de manière simple la raison d’être des Traités ancestraux. Cet ouvrage a été traduit en français aux Éditions des Plaines en 2023 sous le titre Mishomis raconte les Traités : tant que les rivières couleront.
Aux côtés de son mishomis – son grand-père -, une jeune fille écoute et observe la nature. C’est le printemps et dans la rivière, la glace et Grand-Père Soleil travaillent ensemble pour créer une intense transition : celle du retour des eaux vives.
C’est l’occasion pour l’aîné de rappeler à sa petite-fille les responsabilités de toutes et tous envers la nature et parler des Traités, ces partenariats essentiels pour vivre en harmonie. À commencer par le tout premier, celui entre Grand-père Soleil, Grand-mère Lune et la Terre, pour créer la vie.
Des principes vite oubliés
Il lui rappelle que les Traités sont les fondations de relations d’égal à égal basées sur le respect, l’écoute et la volonté de collaborer et faire des compromis pour le mieux-être de tous. Des principes que les signataires venus d’Europe ont vite oublié, contrairement aux peuples autochtones.
« C’était important pour moi d’aborder ce sujet, confie Aimée Craft, car des Aînés m’ont demandé de renforcer l’idée que les traités ne sont pas seulement des conceptions de la Couronne britannique. Ils faisaient déjà partie de pratiques ancestrales autochtones essentielles pour le maintien de bonnes relations. Je voulais qu’on se réapproprie les traités. »
Son ouvrage a d’abord pris la forme d’une nouvelle littéraire dans une publication pour adultes. Puis la maison d’édition Annick Press a contacté l’autrice pour lui proposer d’en faire un livre pour enfants.
Pour les enfants
La requête a immédiatement plu à Aimée Craft. « Depuis plusieurs années, je travaille avec la Commission des relations découlant des traités du Manitoba, et nous avons fait des présentations dans les écoles. J’ai souvent formé des enseignants sur comment communiquer sur le concept des traités. C’est là que j’ai réalisé le manque de ressources pour les enfants à ce sujet. En avoir une comme mon livre m’aurait aidée. »
Un sentiment partagé, puisque dès la publication de l’ouvrage d’Aimée Craft en anglais, « plusieurs gens m’ont dit qu’il fallait absolument que mon livre soit aussi publié en français car c’était une ressource que les écoles n’avaient pas en ce moment ».
L’auteure autochtone précise toutefois que son livre ne parle pas des traités modernes. « Les traités modernes, en grande partie, sont des documents hyper légaux négociés sous forme de contrats selon une politique particulière du gouvernement fédéral datant des années 1970. Ça implique des avocats, des juristes… Je dirais donc qu’ils sont un peu différents des traités ancestraux en nature, même s’il y a quand même certaines ressemblances. »
Pour rendre son histoire plus accessible aux enfants, Aimée Craft a par ailleurs travaillé avec l’illustrateur Luke Swinson. « Pour moi, ça fait partie intégrante de l’histoire, affirme-t-elle. Je suis très contente du résultat, il a fait un très beau travail. »
Des lectures
Après sa publication, l’auteure a été invitée à multiples reprises à venir présenter son livre et en faire la lecture dans des bibliothèques, des salles de classe, des centres communautaires ou encore des communautés autochtones.
« Mishomis raconte les Traités : tant que les rivières couleront s’accorde très bien dans les efforts de la Commission de Vérité et de Réconciliation de vraiment prendre au sérieux l’éducation sur l’histoire des interactions entre la Couronne, les peuples autochtones et la société en général, conclut Aimée Craft. Il facilite la vérité, et donc la réconciliation. Et ceci, à tout âge. »
(1) Aimée Craft est titulaire de la Chaire de recherche universitaire Nibi miinawaa aki iaakonigewin : La gouvernance autochtone en relation avec la terre et l’eau, à l’Université d’Ottawa.